Rafael Alberti

Federico García Lorca, María Teresa León, Rafael Alberti. Cuatro Caminos, Madrid. 1934.

(Pour Marie Paule et Raymond Farina)

Rafael Alberti est né le 16 décembre 1902 à El Puerto de Santa María (province de Cadix). Peintre à ses débuts, il devient ensuite poète car il doit rester cloîtré dans sa chambre pour soigner sa tuberculose. Son premier recueil, Marinero en tierra, reçoit le Prix national de Poésie. En 1932, il épouse María Teresa León (1903-1988), romancière et dramaturge dont les oeuvres devraient être mieux connues. Ils deviennent communistes dans les années 30 et jouent un grand rôle dans les milieux intellectuels pendant le guerre civile ( Alianza de Intelectuales Antifascistas ; revue El Mono azul). Ils vivent en exil ,d’abord en Argentine, ensuite à Rome (Italie) de 1939 à 1977. Rafael Alberti et María Teresa León rentrent en Espagne le 27 avril 1977. Le poète devient cette année-là député communiste. Il obtient le prix Cervantès en 1983. Il meurt dans sa ville natale le 28 octobre 1999. Ses cendres sont dispersées dans la Baie de Cadix. Certains de ses poèmes, mis en musique notamment par Paco Ibáñez, sont très célèbres (A galopar, Balada del que nunca fue a Granada, Muelle del reloj, Nocturno).

Une grande amitié le liait a Federico García Lorca, mais aussi une certaine rivalité poétique.

https://www.lesvraisvoyageurs.com/2019/11/02/maria-teresa-leon/

Fundación Rafael Alberti. El Puerto de Santa María.

A Federico García Lorca, poeta de Granada

(1924)

I

(Otoño)

En esta noche en que el puñal del viento
acuchilla el cadáver del verano,
yo he visto dibujarse en mi aposento
tu rostro oscuro de perfil gitano.

Vega florida. Alfanjes de los ríos,
tintos en sangre pura de las flores.
Adelfares. Cabañas. Praderíos.
Por la sierra, cuarenta salteadores.

Despertaste a la sombra de una oliva,
junto a la pitiflor de los cantares.
Tu alma de tierra y aire fue cautiva…

Abandonando, dulce, sus altares,
quemó ante ti una anémona votiva
la musa de los cantos populares.

II

(Primavera)

(Primavera)

Todas mis novias, las de mar y tierra
– Amaranta, Coral y Serpentina,
Trébol del agua, Rosa y Leontina -,
verdes del sol, del aire, de la sierra;

contigo, abiertas por la ventolina,
coronándote están sobre las dunas,
de amarantos, corales y de lunas
de tréboles del agua matutina.

¡Vientos del mar, salid, y, coronado
por mis novias, mirad al dulce amigo
sobre las altas dunas reclinado!

¡Peces del mar, salid, cantad conmigo:
– Pez azul yo te nombro, al desabrigo
del aire, pez del monte, colorado!

III

(Verano)

Sal tú, bebiendo campos y ciudades,
en largo ciervo de agua convertido,
hacia el mar de las albas claridades,
del martín-pescador mecido nido;

que yo saldré a esperarte amortecido,
hecho junco, a las altas soledades,
herido por el aire y requerido
por tu voz, sola entre las tempestades.

Deja que escriba, débil junco frío,
mi nombre en esas aguas corredoras,
que el viento llama, solitario, río.

Disuelto ya en tu nieve el nombre mío,
vuélvete a tus montañas trepadoras,
ciervo de espuma, rey del monterío.

Marinero en tierra, 1924.

Rafael Alberti. Obra completa. Aguilar. 1988.

A Federico García Lorca, poète de Grenade

(1924)

I

(automne)

Cette nuit où le vent et son stylet
poignardent le cadavre de l’été,
j’ai vu, dans ma chambre, se dessiner
ton visage brun au profil gitan.

La vega fleurie. Les fleuves, alfanges
rougies par le sang virginal des fleurs.
Lauriers-roses. Chaumines et prairies.
Et dans la sierra, quarante voleurs.

Tu t’es réveillé sous un olivier,
avec près de toi la fleur des comptines.
Ton âme de terre et brise, captive…

Lors abandonnant, très doux, ses autels,
l’ange des chansons est venu brûler
devant toi une anémone votive.

II

(printemps)

Toutes mes fiancées, de mer et de terre
– Amarante, Corail et Serpentine,
Trèfle-de-l’Onde, Rose, Léontine -,
vertes du soleil, du vent, des sierras ;

ouvertes par la brise et rassemblées,
te couronnent là, au milieu des dunes,
d’amarantes, de coraux et de lunes
de trèfles de l’onde à l’aube éveillée.

Venez, vents de la mer, et regardez
l’ami, couronné par mes fiancées,
si doux, incliné sur les hautes dunes !

Venez, poissons des mers, chantons ensemble :
– Poisson bleu, je te nomme, à tous les vents,
poisson des bois et monts, rouge poisson !

III

(été)

Viens, en t’abreuvant de champs et de villes,
et cerf devenu, d’eau long cervidé,
rejoins cette mer aux blanches clartés,
ce doux nid bercé du martin-pêcheur ;

car je vais aller t’attendre, soumis,
et jonc devenu, dans les hauts espaces,
blessé par l’air vif tandis que me hêle
ta voix solitaire au sein des tempêtes.

Jonc fragile et froid, laisse-moi écrire
mon nom sur ces eaux livrées à leur cours
que le vent appelle, esseulé, rivière.

Emportant mon nom fondu à ta neige,
retourne à tes monts grimpant vers leurs cimes,
cerf d’écume, roi de la vénerie.

Marin à terre suivi de L’Amante et de L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

La Futaie perdue (Mémoires). (Tomes I et II). Traduction : Robert Marrast et Claude Couffon. Belfond, 1984.

Paco Ibáñez chante Nocturno.

https://www.youtube.com/watch?v=sNQRsgbmtgE

Rafael Alberti (Alberto Schommer). 1985.

Rafael Alberti

Retrato de Rafael Alberti. (Gregorio Prieto) 1923. Valdepeñas (Ciudad Real) , Museo Gregorio Prieto.

Rafael Alberti est né le 16 décembre 1902 à El Puerto de Santa María (Cadix). Il est mort dans sa ville natale le 28 octobre 1999. Il fait partie de la génération de 1927. En 1917, sa famille s’installe à Madrid où son père est amené à travailler. Il doit s’éloigner avec regret de la baie de Cadix. Il se destine à la peinture, mais, à l’automne 1920, la maladie l’oblige à garder la chambre, puis à faire un séjour dans la Sierra de Guadarrama. Il découvre alors sa vocation poétique.  Il a 23 ans quand son premier recueil de poèmes, Marinero en tierra (Marin à terre), obtient le Prix national de Littérature. Dans le jury, figurent deux poètes : Antonio Machado et José Moreno Villa. Le montant du prix est de cinq mille pesetas. Une vraie fortune. Le recueil est publié à l’automne 1925 par la Biblioteca Nueva de Madrid. Juan Ramón Jiménez lui adresse une lettre enthousiaste le 31 mai 1925. (” Enhorabuena y gracias de su amigo y triple paisano: por tierra, mar y cielo del oeste andaluz, Juan Ramón. “) Il fréquente alors la Residencia de Estudiantes de Madrid et se lie d’amitié avec Federico García Lorca, Luis Buñuel, Pepín Bello et Salvador Dalí. Le premier cycle de sa poésie (Marinero en tierra, La amante, El alba del alhelí) se situe dans la tradition des recueils de chansons, mais sa position comme celle de Federico García Lorca, son ami et rival, est celle d’un poète d’avant-garde.

Sin título (Poniente). (Rafael Alberti). 1920. Madrid, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía.

1

El mar. La mar.
El mar. ¡Sólo la mar!

¿Por qué me trajiste, padre,
a la ciudad?

¿Por qué me desenterraste
del mar?

En sueños, la marejada
me tira del corazón.
Se lo quisiera llevar.

Padre, ¿por qué me trajiste
acá?

Marinero en tierra, 1924.

1

La mer. La mer.
La mer. Rien que la mer !

Pourquoi m’avoir emmené, père,
à la ville ?

Pourquoi m’avoir arraché, père,
à la mer ?

La houle, dans mes songes,
me tire par le coeur
comme pour l’entraîner.

Ô père, pourquoi donc m’avoir
emmené ?

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

19

Desde alta mar

No quiero barca, corazón barquero,
quiero ir andando por la mar al puerto.

¡Qué dulce el agua salada
con su salitre hecho cielo!
¡No quiero sandalias, no!
Quiero ir descalzo, barquero

No quiero barca, corazón barquero,
quiero ir andando por la mar al puerto.

Marinero en tierra, 1924.

19

Haute mer

Pas de barque, mon coeur pilote :
je veux aller à pied sur la mer jusqu’au port.

Quelle douceur a l’eau salée
dont le salpêtre s’est fait ciel !
Pas de sandales, non, mon coeur !
Je veux aller pieds nus, pilote.

Pas de barque, mon coeur pilote :
je veux aller à pied sur la mer jusqu’au port.

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

21

Siempre que sueño las playas,
las sueño solas, mi vida.
…Acaso algún marinero…
quizás alguna velilla
de algún remoto velero…

Marinero en tierra, 1924.

21

Chaque fois que je rêve aux plages,
je les rêve seules, ma vie.
… Avec peut-être un matelot …
aussi peut-être un petit foc,
lointain, au-dessus d’une coque …

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

Sin título (Un sol de agrias notas). (Rafael Alberti). 1920. Madrid, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía

31

A la sombra de una barca,
fuera de la mar, dormido.

Descalzo y el torso al aire.
Los hombros, contra la arena.

Y contra la arena el sueño,
a la sombra de una barca,
fuera de la mar, sin remos.

Marinero en tierra, 1924.

31

Á l’ombre d’une barque
hors de l’eau, endormi.

Pieds nus. Le torse au vent.
Épaules contre sable.

Contre sable, rêvant,
à l’ombre d’une barque,
hors de l’eau, et sans rames.

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

49

Murallas azules, olas,
del África, van y vienen.

Cuando van…
¡Ay, quién con ellas se fuera!

¡Ay, quién con ellas volviera!
Cuando vuelven…

Marinero en tierra, 1924.

49

Murailles bleues, les vagues,
d’Afrique, vont et viennent.

Quand elles vont…
Ah ! Qui ne les suivrait !

Ah ! Qui ne les suivrait !
Quand s’en reviennent…

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

60

Si yo nací campesino,
si yo nací marinero,
¿por qué me tenéis aquí,
si este aquí yo no lo quiero?

El mejor día, ciudad
a quien jamás he querido,
el mejor día -¡silencio! –
habré desaparecido.

Marinero en tierra, 1924.

60

Si je suis né homme des terres,
si je suis né homme de mer,
pourquoi me retenir ici,
si je n’aime pas cet ici ?

Mais un beau jour tu apprendras,
ville qui jamais ne m’as plu,
mais un beau jour tu apprendras
– silence ! – que j’ai disparu.

Marin à terre, L’Amante et L’aube de la giroflée. 1985. Poésie Gallimard n°474. 2012. Traduction Claude Couffon.

Rafael Alberti – María Teresa León

Première édition, février 1995.

Le poète Rafael Alberti (1902-1999) et sa femme, María Teresa León (1903-1988), elle aussi écrivain, arrivent à Ibiza le dimanche 28 juin 1936 pour passer leurs vacances d’été. Ils cherchent un endroit tranquille et abordable pour se reposer et écrire. Ils devaient aller en Galice, mais un accident de train meurtrier le 24 juin sur la ligne Madrid-La Corogne, les a fait changer d’avis au dernier moment. Les deux premières semaines sont calmes. Ils ont loué une maison (Molí de Socarrat), près de Puig des Molins, où se trouve la plus grande nécropole punique du monde. Ils parcourent l’île et établissent des liens d’amitié avec de nombreux habitants. La Guerre Civile éclate le 18 juillet 1936. Les militaires réussissent à contrôler l’ensemble de l’archipel des Baléares, à l’exception de Minorque. Le commandant d’infanterie Julio Mestre se met à la tête des troupes à Ibiza le 19 juillet, déclare l’état de guerre et arrête les principaux dirigeants des partis de gauche et des syndicats. Le couple reste trois jours dans la maison, puis se cache avec une vingtaine d’autres personnes pendant vingt jours dans une grotte (Monte del Corb Marí), près de la tour de sa Sal Rossa et du Parc Natural de ses Salines.

Le 8 août 1936, deux colonnes républicaines débarquent dans l’île : l’une vient de Barcelone a à sa tête le capitaine d’aviation Alberto Bayo ; l’autre de Valence et est dirigée par le capitaine de la Garde civile Manuel Uribarri.

Rafael Alberti et María Teresa León participent au Comité des Milices Antifascistes et interviennent pour protéger le patrimoine religieux des églises face aux miliciens anarchistes qui veulent le détruire. Le 11 août 1936, les deux écrivains quittent l’ile pour Valence.

La grotte.
Monolithe placée devant la grotte.

Rafael Alberti publiera un récit littéraire, tirée de cette expérience, en 1937 dans la revue de la Alianza de Intelectuales Antifascistas para la Defensa de la Cultura, El Mono Azul : Una historia de Ibiza. María Teresa León racontera ce séjour dans Memoria de la melancolía (Buenos Aires, Losada, 1970).

Un monolithe en béton de 180 kilos a été installé récemment près de la grotte. Une plaque du céramiste local Antoni Ribas Costa (Toniet) inclut un court extrait de Memoria de la melancolía de María Teresa León.

Deux poèmes Rafael Alberti, tirés Retornos de lo vivo lejano (1952), évoquent bien cette période et son influence sur l’oeuvre de ces deux écrivains : Retornos de una isla dichosa et Retornos del amor fugitivo en los montes.

Retornos de una isla dichosa

La felicidad vuelve con el nombre ligero
de un presuroso y grácil joven alado: Aire.
Por parasoles verdes, las sombras que retornan
contestan, y el amor, por otro nombre: Isla.

Venid, días dichosos, que regresais de lejos
teniendo por morada las velas de un molino;
por espejo la luna, la que el sol tiró al pozo,
y por bienes del alma,
todo el mar apresado en pequeñas bahías.
Llegad, alegres olas de mis años, risueños
labios de espuma abierta de las blancas edades.
Suenen mis ojos, canten con repetidas lágrimas
al pastor que desnudo da a la mar sus ovejas.

Ven otra vez, doblada
maravilla incansable de los viejos olivos.
Me abracen nuevamente tus raíces, hundiéndome
en las tumbas de muestran su soledad al cielo.

Quiero tocaros, santas, invencibles higueras,
abatidas de zumos, pero no de cansancio.
Dejadme en la apretada oscuridad inmóvil
de vuestra fresca alcoba dormir tranquilamente.

Soñar, soñar dormido, desde allí, en las colinas
donde los algarrobos
dan su miel a las nieves de la flor del almendro;
desde donde calladas huertas corren sus límites
abriendo arcos de cal arrobados de adelfas.

Despierte, al descorrer las ramas, ya en la tarde,
padeciendo el deseo de morirme en las dunas,
cuando al sol no le espera más final que el antiguo
de embozarse en los hombros mojados de la noche.

Isla de amor, escúchame, antes de que te vayas,
antes, ya que has venido, de que escapes de nuevo:
Concédeme la gracia de aclarar los perfiles
del canto que a mi lengua le quede aún, poniéndole
esa azul y afilada delgadez de contornos
que subes cuando al alba renaces sin rubores,
feliz y enteramente desnuda, de las olas.

Retornos de lo vivo lejano, 1952.

Retornos del amor fugitivo en los montes

Era como una isla de Teócrito. Era
la edad de oro de las olas. Iba
a alzarse Venus de la espuma. Era
la edad de oro de los campos. Iba
Pan nuevamente a repetir su flauta
y Príapo a verterse en los jardines.
Todo era entonces. Todo entonces iba.

Iba el amor a ser dichoso. Era
la juventud con cinco toros dentro.
Iba el ardor a arder en los racimos.
Era la sangre un borbotón de llamas.
Era la paz para el amor. Venía
la edad de oro del amor. Ya era.

Pero en la isla aparecieron barcos
y hombres armados en las playas. Venus
no fue alumbrada por la espuma. El aire
en la flauta de Pan se escondió, mudo.
Secas, las flores sin su dios murieron
y el amor, perseguido, huyó a los montes.

Allí labró su cueva , como errante
hijo arrojado de una mar oscura,
entre el mortal y repetido estruendo
que la asustada Eco devolvía.

Agujas rotas de los parasoles
pinos le urdieron al amor su lecho.
Fieras retamas, mustias madreselvas,
rudos hinojos y áridos tomillos
lo enguirnaldaron en la ciega noche.
Y aunque, lengua de fuego, el aire aullara
alrededor, la tierra, oh, sí, la tierra
no le fue dura, sin embargo, al sueño
del fugitivo amor entre los montes.

La edad de oro del amor venía,
pero en la isla aparecieron barcos…

Retornos de lo vivo lejano, 1952.

Rafael Alberti 1902 – 1999

Rafael Alberti, María Teresa León. v 1931.

Lu ce matin dans El País deux articles sur le poète andalou Rafael Alberti, un peu oublié aujourd’hui.
Sa fondation à Puerto de Santa María (Cádiz) prend l’eau et est criblée de dettes. Plus de vingt après sa mort, sa fille, Aitana Alberti et sa veuve, María Asunción Mateo se disputent encore son héritage.
Il y a quelques années nous y étions allés. On ne pouvait pas la visiter. ¡Qué pena ! Je me souviens de lui et de sa première épouse, María Teresa León, (1903-1988), croisés un soir, 198 Rue Saint-Jacques dans les années soixante-dix au Comité d’information et de solidarité avec l’Espagne (CISE). C’était les dernières années du franquisme. Le poète rentra en Espagne le 27 avril 1977, après 38 ans d’exil. Il fut élu député PCE pour la province de Cádiz lors des élections du 15 juin 1977, mais laissa rapidement sa place à Francisco Cabral Oliveros, syndicaliste paysan de Trebujena.
Marcos Ana (Fernando Macarro Castillo) (1920-2016), emprisonné pendant 23 ans, avait fondé et dirigé le Comité d’information et de solidarité avec l’Espagne (CISE) dont Pablo Picasso était le président.
“Rafael Alberti, un legado cultural en números rojos”

https://elpais.com/cultura/2021-03-09/rafael-alberti-un-legado-cultural-en-numeros-rojos.html

“El Madrid insomne de Rafael Alberti” https://elpais.com/ccaa/2019/10/28/madrid/1572250456_753860.html?rel=listapoyo

Puerto de Santa María (Cádiz). Fundación Rafael Alberti.

El mar, la mar ( Rafael Alberti )

El mar. La mar.
El mar. ¡Sólo la mar!

¿Por qué me trajiste, padre,
a la ciudad?

¿Por qué me desenterraste
del mar?

En sueños, la marejada
me tira del corazón.
Se lo quisiera llevar.

Padre, ¿por qué me trajiste
acá?

Marinero en tierra, 1924. Premio Nacional de Poesía.

La mer. La mer.

La mer. La mer.
La mer. Rien que la mer !

Pourquoi m’avoir emmené, père,
à la ville?

Pourquoi m’avoir arraché, père,
à la mer ?

La houle, dans mes songes
me tire par le coeur
comme pour l’entraîner.

O père, pourquoi donc m’avoir
emmené ?

Marin à terre. Traduction Claude Couffon. Paris, Gallimard, 1985.

(Rafael Alberti)

Rafael Alberti

Rafael Alberti. Punta del Este.1943.

Rafael Alberti évoque la figure de Ramón dans La arboleda perdida. Il critique ses prises de position franquistes, mais reconnaît son génie.

La arboleda perdida. Tercer libro (1931-1977). 1987.

«Ramón Gómez de la Serna vive muy aislado, casi oculto, en la ciudad de Buenos Aires desde el inicio de nuestra guerra civil. Yo, a pesar de que lo admiraba de verdad, me pasé muchos años sin saludarlo, debido a su tonto e innecesario franquismo, que lo alejó de sus más grandes amigos. Ramón se aburría hasta el infinito -él, tan bullanguero y sacamuelas- en la Argentina sin su tertulia cafetera de Pombo, en la que había sido su dirigente inagotable y genial. Un día, un hermano, por cierto comunista, de su mujer, la delicada y muy hermosa escritora hebrea Luisa Sofovich, me dijo que Ramón vivía muy triste, sin ver a nadie, desesperado, tan lejos de Madrid, preguntándome tímidamente si a mí no me importaría verlo. Me emocionó la petición. Nunca habíamos comprendido el franquismo de Ramón, digno, en verdad, de aquel personaje de su novela Gustavo el incongruente, pues al principio de la guerra, allá en su soledad argentina, Ramón había escrito greguerías laudatorias dedicadas a Ramón Franco, el aviador, creyendo que se trataba del generalísimo. ¡Gran ramonada esta ramoniana confusión de Ramón! Cuando por fin fui a verlo, Ramón me recibió sentado ante la mesa de su comedor, como si estuviera oficiando en su amada tertulia pombiana, iluminándosele la ancha cara de chispero goyesco, hablando alegremente, casi a gritos, y levantándose, a veces, lo mismo que en el cuadro que Gutiérrez Solana le pintó, rodeado de los más famosos contertulios. De pronto, Ramón alzó una mano, ofreciéndole el dedo índice doblado a su mujer, como si fuese el saltadero de una jaula, invitándola muy cariñosamente: “Apoye usted, mi pajarito, sus patitas en este dedo”. Luisa, prendiendo dos de los suyos sobre el que le ofrecía Ramón, estuvo así todo el tiempo que duró la visita. En un momento que Ramón aspiró una bocanada de humo que yo solté de mi pipa, me preguntó por el tabaco que fumaba. “Dunhill”, le dije. Muy serio entonces, me sentenció, rotundo: “¡Cáncer! Mi hermano fumaba esos tabacos. Y se murió. Hay que fumar el que yo fumo: La hija del toro de América“. Y a continuación se preparó una pipa con aquel horrible tabaco, que levantó una fumarola como la del Vesubio, despidiendo un fuerte olor a yerbajos secos, mezclado con el de las cerillas que había dejado dentro del hogar de su pipa, ya que aquel tabaco -afirmaba- tenía mejor sabor mezclado con ellas.

Más tarde, y ya muerto Ramón, le dediqué este soneto impuntuado, en el que quise dar, todo revuelto, lo que fue para mí el gran inventor de las greguerías:

Por qué franquista tú torpe ramón
elefante ramón payaso harina
ramón zapato alambre golondrina
solana madrid pombo pin pan pon

ramón senos ramón chapeaumelón
tío-vivo ramón pipa pamplina
sacamuelas trapero orina esquina
y con de en por sin sobre tras ramón

ramón columpio múltiple vaivén
descabezado tonto ten sin ten
ramón orquesta solo de trombón

ramón timón tampón titiritero
incongruente inverosímil pero
ramón genial ramón solo ramón.

… Pero le dije a Ramón que Juan Ramón Jiménez estaba en Buenos Aires. Habían sido en otro tiempo muy amigos. Discretamente, Juan Ramón me insinuó que quería verlo, que se lo preguntara. Ramón dijo que sí. Al día siguiente, yo acompañé al poeta de Huelva con su mujer, Zenobia, a casa de Ramón. La escalera del piso donde vivía arrancaba del zaguán. Cuando llegamos, Ramón esperaba en el rellano de su piso al lado de Luisita. “¡Un momento!”, gritó a Juan Ramón, sin más saludo. “¡Un momento! ¿Puedes explicarme, antes de subir, por qué escribes Dios sin mayúscula últimamente? A Dios le han quitado ya todo en la tierra. Y ahora vienes tú y le quitas lo último que le quedaba: la mayúscula. Promete que se la devolverás”. A Juan Ramón le temblaba la barba. Balbució algo que no entendí. Y me fui detrás de él y de Zenobia, cerrando la puerta de la calle suavemente.»

Rafael Alberti

Rafael Alberti.

Elegía

La niña rosa, sentada.
Sobre su falda,
como una flor,
abierto, un atlas.

¡Cómo la miraba yo
viajar, desde mi balcón!
Su dedo, blanco velero,
desde las islas Canarias
iba a morir al mar Negro.

¡Cómo lo miraba yo
morir, desde mi balcón!.

La niña, rosa sentada.
Sobre su falda,
como una flor,
cerrado, un atlas.

Por el mar de la tarde
van las nubes llorando
rojas islas de sangre.

Marinero en tierra, 1924.

El poema tiene una historia curiosa. Rafael Alberti habla en sus memorias (La arboleda perdida, 1959) de “una niña de doce o trece años, a quien en los largos primeros meses de mi enfermedad [una afección pulmonar padecida a los 18 años] contemplaba abstraída ante un atlas geográfico tras los cristales encendidos de su ventana. Desde la mía, sólo un piso más alta, veía cómo su dedo viajaba lentamente por los mares azules…”. Y añade: “Ella fue mi callado consuelo durante muchos atardeceres”. “Esta pura y primitiva imagen… me acompañó por largo tiempo, llegando a penetrar hasta en canciones de mi Marinero en tierra…”. Pero la niña no murió; simplemente, se hizo mayor y salió de la vida del poeta, quien afirma: “se me borró del todo, muriéndoseme verdaderamente”. Como puede verse, Elegía constituye, pues, una transformación de aquel recuerdo en poesía.

Esa afección pulmonar le obligó al joven poeta a desplazarse a la localidad segoviana de San Rafael, en la sierra de Guadarrama. En el retiro, comenzó a trabajar los versos que luego formarían Marinero en tierra.

(Merci à Catherine I. de m’avoir rappelé ce poème)