Bob Dylan (Robert Allen Zimmerman) est né le 24 mai 1941 à Duluth (Minnesota). Prix Nobel de Littérature 2016, il a aujourd’hui 78 ans.
Le poème de Blas de Otero (1916-1979) renvoie à celui du grand poète péruvien César Vallejo (1892-1938).
Tiempo (Blas de Otero)
Hoy es Domingo y por eso decía César Vallejo por eso escucho a Bob Dylan me hundo en el fondo del subconsciente buceo a ojos cerrados y todo aparece diáfano como la armónica de Bob tantos años abatidos furia del angel fieramente humano contra las altas olas yo dije España está perdida dentro de su nombre llamé a la paz con los labios desgarrados pero hoy es domingo y por eso me serené como una verónica de Gitanillo de Triana seccioné mi angustia la guillotiné en despiadados versos pero hoy es domingo y por eso a lo lejos ya viene la galerna la espero a pecho descubierto pecho como la guitarra de Bob Dylan porque hoy es domingo y por eso.
Hojas de Madrid con La galerna. Galaxia Gutenberg, Círculo de lectores, Barcelona, 2010.
Fue domingo en las claras orejas de mi burro… (César Vallejo)
Fue domingo en las claras orejas de mi burro,
de mi burro peruano en el Perú (Perdonen la tristeza).
Mas hoy ya son las once en mi experiencia personal,
experiencia de un solo ojo, clavado en pleno pecho,
de una sola burrada, clavada en pleno pecho.
Tal de mi tierra veo los cerros retratados,
ricos en burros, hijos de burros, padres hoy de vista,
que tornan ya pintados de creencias,
cerros horizontales de mis penas.
En su estatua, de espada,
Voltaire cruza su capa y mira el zócalo,
pero el sol me penetra y espanta de mis dientes incisivos
un número crecido de cuerpos inorgánicos.
Y entonces sueño en una piedra
verduzca, diecisiete,
peñasco numeral que he olvidado,
sonido de años en el rumor de aguja de mi brazo,
lluvia y sol en Europa, y ¡cómo toso! ¡cómo vivo!
¡cómo me duele el pelo al columbrar los signos semanales!
y cómo, por recodo, mi ciclo microbiano,
quiero decir mi trémulo, patriótico peinado.
Ante mi forma encontré aquella forma
en tiempo de crepúsculo,
cuando las desapariciones
confunden los colores a los ojos,
cuando el último amor
busca el cuerpo postrero.
Una angustia sin fondo aullaba entre las piedras;
hacia el aire, hombres sordos,
la cabeza olvidada,
pasaban a lo lejos como libres o muertos.
Vergonzoso cortejo de fantasmas
con las cadenas rotas colgando de las manos.
La vida puso entonces una lámpara
sobre muros sangrientos;
El día ya cansado secaba tristemente
las futuras auroras, remendadas
como harapos de rey.
La lámpara eras tú,
mis labios, mi sonrisa,
forma que hallan mis manos en todo lo que alcanzan.
Si mis ojos se cierran es para hallarte en sueños,
detrás de la cabeza,
detrás del mundo esclavizado,
en ese país perdido
que un día abandonamos sin saberlo.
8 de agosto de 1929.
Un río, un amor, 1929.
Je ne sais quel nom lui donner dans mes rêves
Je rencontrai cette forme devant la mienne
À l’heure du crépuscule,
Quand les disparitions
Confondent pour les yeux les couleurs,
Quand le dernier amour
Cherche l’ultime corps.
Une angoisse sans fond hurlait entre les pierres;
En route vers l’air, des hommes sourds,
Tête oubliée,
Passaient au loin, libres ou morts ;
Honteux cortège de fantômes
Et leurs chaînes brisées qui pendaient à leurs mains.
Alors la vie posa une lampe
Sur des murs sanglants ;
Le jour déjà fatigué séchait tristement
Les futures aurores, rapiécées
Comme loques de roi.
La lampe c’était toi,
Mes lèvres, mon sourire,
Forme que trouvent mes mains dans tout ce qu’elles touchent.
Si mes yeux se ferment c’est pour te trouver en rêve,
Derrière la tête,
Derrière le monde asservi,
Dans ce pays perdu
Que sans le savoir nous avons quitté un jour.
8 août 1929.
Un fleuve, un amour Editions Fata Morgana, 1985. Traduction de Jacques Ancet.
La parabole du hérisson a été reprise entre autres par Sigmund Freud et Luis Cernuda:
Arthur Schopenhauer,Parerga et Paralipomena (Suppléments et omissions), 1851.
«Par une froide journée d’hiver un troupeau de porcs-épics s’était mis en groupe serré pour se garantir mutuellement contre la gelée par leur propre chaleur. Mais tout aussitôt ils ressentirent les atteintes de leurs piquants, ce qui les fit s’écarter les uns des autres. Quand le besoin de se réchauffer les eut rapprochés de nouveau, le même inconvénient se renouvela, de sorte qu’ils étaient ballottés de çà et de là entre les deux maux jusqu’à ce qu’ils eussent fini par trouver une distance moyenne qui leur rendît la situation supportable. Ainsi, le besoin de société, né du vide et de la monotonie de leur vie intérieure, pousse les hommes les uns vers les autres ; mais leurs nombreuses manières d’être antipathiques et leurs insupportables défauts les dispersent de nouveau. La distance moyenne qu’ils finissent par découvrir et à laquelle la vie en commun devient possible, c’est la politesse et les belles manières. En Angleterre on crie à celui qui ne se tient pas à cette distance: Keep your distance! Par ce moyen le besoin de se réchauffer n’est, à la vérité, satisfait qu’à moitié, mais, en revanche, on ne ressent pas la blessure des piquants. Cependant celui qui possède assez de chaleur intérieure propre préfère rester en dehors de la société pour ne pas éprouver de désagréments, ni en causer. »
Sigmund Freud, Psychologie collective et analyse du moi, 1921, dans Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1963.
« Un jour d’hiver glacial, les porcs-épics d’un troupeau se serrèrent les uns contre les autres, afin de se protéger contre le froid par la chaleur réciproque. Mais, douloureusement gênés par les piquants, ils ne tardèrent pas à s’écarter de nouveau les uns des autres. Obligés de se rapprocher de nouveau, en raison d’un froid persistant, ils éprouvèrent une fois de plus l’action désagréable des piquants, et ces alternatives de rapprochement et d’éloignement durèrent jusqu’à ce qu’ils aient trouvé une distance convenable où ils se sentirent à l’abri des maux ».
Luis Cernuda, Introduction à Donde habite el olvido (1932-1933) Publié en 1934.
« Como los erizos, ya sabéis, los hombres un día sintieron su frío. Y quisieron compartirlo. Entonces inventaron el amor. El resultado fue, ya sabéis, como en los erizos. ¿Qué queda de las alegrías y penas del amor cuando éste desaparece? Nada, o peor que nada; queda el recuerdo de un olvido. Y menos mal cuando no lo punza la sombra de aquellas espinas; de aquellas espinas, ya sabéis. Las siguientes páginas son el recuerdo de un olvido.”
Fernando Aramburu (Saint-Sébastien, 1959), le romancier à succès de Patria (Tusquets 2016, publié en français sous le même titre chez Actes Sud en 2018, traduit par Claude Bleton) après un livre très personnel Autorretrato sin mí (Tusquets, 2018), présente dans Vetas profundas (Tusquets, 2019) 40 poèmes de grands écrivains en langue espagnole. Il s’approche d’eux sans aucune ambition universitaire et nous montre ce qu’ils représentent pour lui. Aramburu s’exprime essentiellement en prose, mais quand il était jeune il a participé dans sa ville natale basque à la fondation du groupe CLOC de Arte y Desarte, qui a édité entre 1978 et 1981 une revue. En début de semaine, j’ai trouvé un exemplaire de son livre chez Gibert. Los justos de Jorge Luis Borges est le premier poème qu’il analyse.
Los justos
Un hombre que cultiva un jardín, como quería Voltaire. El que agradece que en la tierra haya música. El que descubre con placer una etimología. Dos empleados que en un café del Sur juegan un silencioso ajedrez. El ceramista que premedita un color y una forma. Un tipógrafo que compone bien esta página, que tal vez no le agrada. Una mujer y un hombre que leen los tercetos finales de cierto canto. El que acaricia a un animal dormido. El que justifica o quiere justificar un mal que le han hecho. El que agradece que en la tierra haya Stevenson. El que prefiere que los otros tengan razón. Esas personas, que se ignoran, están salvando el mundo.
La cifra, 1981.
Les justes
Un homme qui cultive son jardin, comme le voulait Voltaire.
Celui qui est reconnaissant que sur la terre il y ait de la musique.
Celui qui découvre avec plaisir une étymologie.
Deux employés qui dans un café du Sud jouent un silencieux jeu d’échecs.
Le céramiste qui prémédite une couleur et une forme.
Un typographe qui compose bien cette page, qui peut-être ne lui plaît pas.
Une femme et un homme qui lisent les tercets finaux d’un certain chant.
Celui qui caresse un animal endormi.
Celui qui justifie ou veut justifier un mal qu’on lui a fait.
Celui qui est reconnaissant que sur terre il y ait un Stevenson.
Celui qui préfère que les autres aient raison.
Ces personnes, qui s’ignorent, sont en train de sauver le monde.
Quelle ville ressemble au vin ?
Paris.
Tu bois le premier verre.
Il est âpre.
Au second,
il te monte à la tête,
Au troisième,
Impossible de quitter la table:
Garçon, encore une bouteille !
Ensuite, où que tu sois
où que tu ailles
tu es accro de Paris, mon vieux.
Quelle ville
demeure belle même s’il pleut quarante jours durant ?
Paris…
Fils de Hikmet, dans quelle ville
voudrais-tu mourir ?
A Istanbul,
A Moscou,
et aussi à Paris…
A quel moment Paris devient-il laid?
Quand on met à sac les imprimeries,
et qu’on brûle les livres.
Qu’est-ce qui n’est pas seyant pour Paris ?
Les cars noirs aux vitres grillagées.
Dans quelle ville as-tu mangé
le pain le plus pur ?
A Paris.
Les croissants au beurre surtout.
A croire qu’ils sortent
du boulanger à Chehzadébachi.
Ce que tu as le plus aimé à Paris ?
C’est Paris.
A qui as-tu porté des fleurs, camarade ?
Au Mur des Fédérés,
Et aussi à une belle, fine comme la branche.
Parmi les tiens, qui as-tu rencontré à Paris ?
Namik Kemal, Ziya Pacha, Moustafa Suphi,
et puis la jeunesse de ma mère :
elle fait de la peinture,
elle parle français,
elle est la plus belle du monde.
Et puis j’ai rencontré aussi
la jeunesse de Mimi.
Bon; à qui Paris ressemble-t-il ? Au Parisien… Est-ce que tu crois en Paris, fils-de-l’homme ? Je crois en Paris.
Paris, 15 mai 1958
Il neige dans la nuit et autres poèmes, Gallimard, 1999. Choix et traduction Munevver et Guzine Dino.
L’automne déjà!—Mais pourquoi regretter un éternel soleil, si nous sommes engagés à la découverte de la clarté divine, — loin des gens qui meurent sur les saisons.
L’automne. Notre barque élevée dans les brumes immobiles tourne vers le port de la misère, la cité énorme au ciel taché de feu et de boue. Ah! les haillons pourris, le pain trempé de pluie, l’ivresse, les mille amours qui m’ont crucifié! Elle ne finira donc point cette goule reine de millions d’âmes et de corps morts et qui seront jugés! Je me revois la peau rongée par la boue et la peste, des vers plein les cheveux et les aisselles et encore de plus gros vers dans le cœur, étendu parmi les inconnus sans âge, sans sentiment… J’aurais pu y mourir… L’affreuse évocation ! J’exècre la misère.
Et je redoute l’hiver parce que c’est la saison du comfort!
— Quelquefois je vois au ciel des plages sans fin couvertes de blanches nations en joie. Un grand vaisseau d’or, au-dessus de moi, agite ses pavillons multicolores sous les brises du matin. J’ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J’ai essayé d’inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. J’ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels. Eh bien ! je dois enterrer mon imagination et mes souvenirs ! Une belle gloire d’artiste et de conteur emportée!
Moi! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre! Paysan!
Suis-je trompé, la charité serait-elle sœur de la mort, pour moi?
Enfin, je demanderai pardon pour m’être nourri de mensonge. Et allons.
Mais pas une main amie ! et où puiser le secours?
————
Oui, l’heure nouvelle est au moins très sévère.
Car je puis dire que la victoire m’est acquise : les grincements de dents, les sifflements de feu, les soupirs empestés se modèrent. Tous les souvenirs immondes s’effacent. Mes derniers regrets détalent,—des jalousies pour les mendiants, les brigands, les amis de la mort, les arriérés de toutes sortes.—Damnés, si je me vengeais !
Il faut être absolument moderne.
Point de cantiques : tenir le pas gagné. Dure nuit! le sang séché fume sur ma face, et je n’ai rien derrière moi, que cet horrible arbrisseau !… Le combat spirituel est aussi brutal que la bataille d’hommes ; mais la vision de la justice est le plaisir de Dieu seul.
Cependant c’est la veille. Recevons tous les influx de vigueur et de tendresse réelle. Et à l’aurore, armés d’une ardente patience, nous entrerons aux splendides villes.
Que parlais-je de main amie ! un bel avantage, c’est que je puis rire des vieilles amours mensongères, et frapper de honte ces couples menteurs, —j’ai vu l’enfer des femmes là-bas;—et il me sera loisible de posséder la vérité dans une âme et un corps.
Le 28 ème Prix Reina Sofía de Poésie Ibéro-américaine, la plus haute récompense du genre dans le monde hispanique, a été décernée hier au poète catalan Joan Margarit, né en 1938 à Sanahuja dans la Province de Lérida. C’est le second auteur en catalan qui obtient ce prix. Le premier fut, en 2000, Pere Gimferrer.
Son père était architecte et sa mère institutrice. Pendant son enfance, sa famille change constamment de domicile. Elle s’installe à Santa Cruz de Tenerife (Canaries) en 1954. Joan Margarit étudie l’architecture à Barcelone où il s’installe définitivement en 1963. Il exerce son métier dans cette ville et est aussi professeur de calcul de structures à l’Ecole Supérieure d’Architecture de l’Université de Barcelone. Il a d’abord publié en castillan. Mais, encouragé par son ami le poète Miquel Martí i Pol (1929-2003), il écrit dans sa langue maternelle à partir de 1978. Il se considère comme un écrivain bilingue. C’est un des poètes catalans les plus lus en Catalogne et dans le reste de la Péninsule. Sa poésie est autobiographique et réaliste.
Cuesta de Atocha
Ens creuem. Ells dos pujen:
la cadira de rodes on s’asseu
encongit, gemegant, un home jove
i el pare, que l’empeny.
Per fer més força, tira els peus enrere i
estira tant com pot cames i braços.
Així, encorbat i tens,
gairebé no pot vèncer la pujada.
Sé el que sent: que es fa vell.
Un maleït instant, en compadir aquest
pare, m’equivoco: encara té el seu fill.
Ara que ja han passat,
contemplo amb un somriure com s’allunyen.
Una dona a un portal em mira amb mala cara.
No sap en quina escena d’amor s’està ficant.
Un hivern fascinant (Proa, 2017)
Cuesta de Atocha
Ellos dos van subiendo y nos cruzamos, en la silla de ruedas, sentado y encogido, solloza un hombre joven. El padre, que la empuja, echa hacia atrás los pies y, para hacer más fuerza, estira cuanto puede las piernas y los brazos. Así, encorvado y tenso, puede vencer apenas la subida. Sé lo que siente: que se ha hecho viejo. Por un maldito instante compadezco a ese padre: un error, puesto que él todavía tiene a su hijo. Esbozo una sonrisa mientras van alejándose. Desde un portal, una mujer me mira con reproche. No comprende en qué escena de amor se está metiendo.
Un asombroso invierno (Visor, 2018).
Primer amor (Joan Margarit)
a José Agustín Goytisolo
En la Girona trista dels set anys,
on els aparadors de la postguerra
tenien un color gris de penúria,
la ganiveteria era un esclat
de llum en els petits miralls d’acer.
Amb el front descansant damunt del vidre,
mirava una navalla, llarga i fina,
bella com una estàtua de marbre.
Com que els de casa no volien armes,
vaig comprar-la en secret i, en caminar,
la sentia, pesant, dins la butxaca.
A vegades l’obria a poc a poc
i sorgia la fulla recta i prima
amb la conventual fredor de l’arma.
Presència callada del perill:
vaig amagar-la, els trenta primers anys,
rere llibres de versos i després
dins un calaix, entre les teves calces
i entre les teves mitges.
Ara, a punt de complir els cinquanta quatre,
torno a mirar-la oberta al meu palmell,
tan perillosa com a la infantesa.
Sensual, freda. Més a prop del coll.
Els motius del llop, 1993.
Primer amor a José Agustín Goytisolo
Triste Girona de mis siete años: en la posguerra los escaparates tenían un color gris de penuria. Y, sin embargo, en la cuchillería, en cada hoja de acero destellaba la luz como si se tratase de pequeños espejos. Descansando la frente en el cristal, miraba una navaja larga y fina, bella como una estatua de mármol. Puesto que en casa no querían armas, fui a comprarla en secreto y, al andar, la sentía, pesada, en mi bolsillo. Cuando, a veces, la abría, muy despacio, surgía, recta y afilada, la hoja con esa conventual frialdad del arma. Silenciosa presencia del peligro: la oculté, los primeros treinta años, tras los libros de versos y, después, en un cajón, metida entre tus bragas y entre tus medias. Hoy, cerca ya de los cincuenta y cuatro, vuelvo a mirarla, abierta en la palma de mi mano, igual de peligrosa que en la infancia. Fría, sensual. Más cerca de mi cuello.
La llibertat
La llibertat és la raó de viure, dèiem, somniadors, d’estudiants. És la raó dels vells, matisem ara, la seva única esperança escèptica. La llibertat és un estrany viatge. Són les places de toros amb cadires damunt la sorra en temps d’eleccions. És el perill, de matinada, al metro, són els diaris al final del dia. La llibertat és fer l’amor als parcs. La llibertat és quan comença l’alba en un dia de vaga general. És morir lliure. Són les guerres mèdiques. Les paraules República i Civil. Un rei sortint en tren cap a l’exili. La llibertat és una llibreria. Anar indocumentat. Són les cançons de la guerra civil. Una forma d’amor, la llibertat.
Els primers freds. Poesía 1975-1995. Proa.
La libertad
Es la razón de nuestra vida,
dijimos, estudiantes soñadores.
La razón de los viejos, matizamos ahora,
su única y escéptica esperanza.
La libertad es un extraño viaje.
Son las plazas de toros con las sillas
sobre la arena en las primeras elecciones.
Es el peligro que, de madrugada,
nos acecha en el metro,
son los periódicos al fin de la jornada.
La libertad es hacer el amor en los parques.
Es el alba de un día de huelga general.
Es morir libre. Son las guerras médicas.
Las palabras República y Civil.
Un rey saliendo en tren hacia el exilio.
La libertad es una librería.
Ir indocumentado.
Las canciones prohibidas.
Una forma de amor, la libertad.
Principaux titres
Cantos para la coral de un hombre solo. Barcelona: Editorial Vicens Vives. 1963. (Con prólogo de Camilo José Cela e ilustraciones de Josep María Subirachs).
J’ai lu le livre La tondue, 1944-1947 (Vendémiaire, 2011). Les auteurs, Philippe Frétigné (facteur de clavecins à Chartres) et Gérard Leray (professeur d’histoire-géographie), ont longtemps travaillé sur l’histoire de la Libération de Chartres. Le point de départ du livre c’est une des photographies les plus connues de la Libération. La Tondue de Chartres a été prise le 16 août 1944, rue du Cheval-Blanc à Chartres, par Robert Capa (pseudonyme d’Endre Ernő Friedmann 1913-1954). Ce photographe a couvert cinq conflits en dix-huit ans. Il est mort le 25 mai 1954 pendant la guerre d’Indochine en sautant sur une mine. Simone Touzeau, vingt-trois ans, a été tondue et marquée au front par un fer rouge. Elle s’avance dans les rues de Chartres, tenant dans ses bras un bébé. La foule qui l’accompagne est à la fois curieuse et hostile. Cette femme est exhibée avec sa famille dans les rues parce qu’elle a eu cet enfant d’un soldat allemand. Mais, quelques jours plus tard, elle est aussi soupçonnée d’être à l’origine d’une rafle. Dans la nuit du 24 au 25 février 1943, cinq chefs de famille de son voisinage avaient été arrêtés par la police de sûreté allemande et accusés d’avoir écouté la BBC. Quatre seront déportés au camp de concentration de Mauthausen. Deux d’entre eux, Fernand Guilbault et Edouard Babouin, n’en reviendront pas. L’accusation n’était pas fondée, mais Simone Touseau avait été embauchée comme secrétaire-interprète par l’armée d’occupation en décembre 1942. C’était une adhérente du PPF de Jacques Doriot depuis 1943. Elle était aussi partie comme volontaire pour travailler en Allemagne de septembre à novembre 1943. Sa mère et elle seront ensuite arrêtées, incarcérées à la prison de Chartres puis transférées au camp de Pithiviers. Elles seront traduites en justice au printemps 1945 pour « atteinte à la sûreté extérieure de l’État ». Elles risquaient la peine de mort. Toute la famille Touseau sera ostracisée ensuite par les Chartrains. En 1946, Simone Touseau apprit la mort de son fiancé allemand, Erich Göz, tué près de Minsk le 8 juillet 1944 à 44 ans. Transférée à Fresnes, elle bénéficiera d’un classement sans suite et sera libérée le 29 novembre 1946. Le 8 mars 1947, elle sera condamnée à dix ans d’indignité nationale. La responsable des dénonciations semble avoir été Ella Amerzin-Meyer ( née le 22 août 1911 ), une autre interprète de nationalité suisse, maîtresse du chef de la sécurité nazie locale. Elle s’enfuiera en Allemagne, sera retrouvée et condamnée aux travaux forcés à perpétuité. Mais le jugement sera ensuite annulé, car elle avait obtenu entre temps la nationalité allemande. Elle décédera le 20 janvier 2016 à 104 ans. La pression du voisinage étant très forte, la famille Touseau déménagera à Saint-Arnoult-en-Yvelines, mais la rumeur finira par les rattraper. Simone Touzeau se mariera en 1954, aura deux autres enfants, puis mourra, dépressive et alcoolique, à l’Hôtel-Dieu de Chartres le 21 février 1966 à 44 ans. L’enfant de la photo ( née le 23 mai 1944 ) est toujours vivant mais souhaite rester anonyme. Convaincu de l’innocence de sa famille dans la rafle de 1943 et désireux de protéger ses proches, il a brûlé toutes les lettres de ses parents. Entre juin et décembre 1944, environ 20 000 femmes françaises ont subi l’humiliation de la tonte.
Bibliographie Alain Brossat, Les Tondues, un carnaval moche, Paris, éditions Manya, janvier 1993. Réédition en 2008. Les Tondues, éditions Hachette. Fabrice Virgili La France « virile ». Des femmes tondues à la Libération. Petite Bibliothèque Payot, 2004.
Comprenne qui voudra ( Paul Eluard )
En ce temps là, pour ne pas châtier
les coupables, on maltraitait des filles.
On allait même jusqu’à les tondre.
Comprenne qui voudra
Moi mon remords ce fut
La malheureuse qui resta
Sur le pavé
La victime raisonnable
À la robe déchirée
Au regard d’enfant perdue
Découronnée défigurée
Celle qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés
Une fille faite pour un bouquet
Et couverte
Du noir crachat des ténèbres
Une fille galante
Comme une aurore de premier mai
La plus aimable bête
Souillée et qui n’a pas compris
Qu’elle est souillée
Une bête prise au piège
Des amateurs de beauté
Et ma mère la femme
Voudrait bien dorloter
Cette image idéale
De son malheur sur terre.
Texte initialement publié dans Les Lettres françaises du 2 décembre 1944
Au rendez-vous allemand, 1944.
Le 1er septembre 1969, Gabrielle Russier, jeune professeur agrégée de Lettres, mère de deux enfants et épouse divorcée (donc libre), se suicidait. Elle avait, dans l’après-Mai 68, entretenu une liaison avec l’un de ses élèves du Lycée Antoine de Saint-Exupéry de Marseille appelé aussi lycée Nord, Christian Rossi, (elle : 32 ans ; lui : 17 ans). Elle venait d’être condamnée à un an de prison avec sursis, sur plainte des parents de la ” victime ” pour détournement de mineur.
Le 22 septembre 1969 le nouveau Président de la République, Georges Pompidou ( élu le 15 juin précédent ) tenait sa première conférence de presse. À la fin de la conférence, le journaliste de Radio Monte-Carlo, Jean-Michel Royer, lui demanda ce qu’il pensait de ce fait-divers ” qui pose des problèmes de fond “.
Surpris par la question ou ému par le drame, le Chef de l’État répondit, en se ménageant de longs silences : “Je ne vous dirai pas tout ce que j’ai pensé sur cette affaire. Ni même d’ailleurs ce que j’ai fait. Quant à ce que j’ai ressenti, comme beaucoup, eh bien, Comprenne qui voudra ! Moi, mon remords, ce fut la victime raisonnable au regard d’enfant perdue, celle qui ressemble aux morts qui sont morts pour être aimés. C’est de l’Éluard. Mesdames et Messieurs, je vous remercie “.
Paul Éluard, écrivit dans un tout autre contexte, celui de l’épuration ( et de la ” collaboration sentimentale ” de nombreuses Françaises avec des soldats allemands ). Georges Pompidou devait s’attendre à la question et avait préparé quelques vers de ce poème. L’intention était louable et l’émotion non feinte.
On a su, depuis, qu’il avait effectivement ordonné une enquête sur la responsabilité mêlée de l’Éducation nationale et de la Justice, et plus précisément sur le fait que le cas de Gabrielle Russier avait échappé aux mesures d’amnistie qui, traditionnellement, accompagnent toute nouvelle élection.
Ida Vitale a reçu le 23 avril 2019 à l’Université d’Alcalá de Henares le Prix Cervantes. Née le 2 novembre 1923 à Montevideo, elle a donc 95 ans. C’est la cinquième femme à recevoir ce prix après la Mexicaine Elena Ponatiowska (2013), l’Espagnole Ana María Matute (2010), la Cubaine Dulce María Loynaz (1992) et l’Espagnole María Zambrano (1988). Et le deuxième écrivain uruguayen après le grand Juan Carlos Onetti (1909-1994) en 1980.
OBRA
POESÍA • La luz de esta memoria (1949). • Fieles (1976 y 1982). • Jardín de sílice (1980). • Procura de lo imposible, (1988). • Jardines imaginarios (1996) • La luz de esta memoria (1999) • Mella y criba (2010). • Sobrevida (2016). • Mínimas de aguanieve (2016) • Poesía reunida. 2017.
PROSA, CRÍTICA Y ENSAYO • Cervantes en nuestro tiempo (1947). • Manuel Bandeira, Cecilia Meireles y Carlos Drummond de Andrade. Tres edades en la poesía brasileña actual (1963). • Juana de Ibarbourou. Vida y obra Capítulo Oriental (1968). • Léxico de afinidades (2012). • De plantas y animales: acercamientos literarios (2003).
PREMIOS Y RECONOCIMIENTOS • Premio Octavio Paz (2009). • Doctora honoris causa por la Universidad de la República (2010). • Premio Alfonso Reyes (2014). • Premio Reina Sofía (2015). • Premio Internacional de Poesía Federico García Lorca (2016). • Premio Max Jacob (2017). • Premio FIL de la Literatura en Lenguas Romances (Feria del libro de Guadalajara, 2018). • Premio Cervantes (2018).
Quelques poèmes
Fortuna
Por años, disfrutar del error
y de su enmienda,
haber podido hablar, caminar libre,
no existir mutilada,
no entrar o sí en iglesias,
leer, oír la música querida,
ser en la noche un ser como en el día.
No ser casada en un negocio,
medida en cabras,
sufrir gobierno de parientes
o legal lapidación.
No desfilar ya nunca
y no admitir palabras
que pongan en la sangre
limaduras de hierro.
Descubrir por ti misma
otro ser no previsto
en el puente de la mirada.
Ser humano y mujer, ni más ni menos.
Este mundo
Sólo acepto este mundo iluminado cierto, inconstante, mío. Sólo exalto su eterno laberinto y su segura luz, aunque se esconda. Despierta o entre sueños, su grave tierra piso y es su paciencia en mí la que florece. Tiene un círculo sordo, limbo acaso, donde a ciegas aguardo la lluvia, el fuego desencadenados. A veces su luz cambia, es el infierno; a veces, rara vez, el paraíso. Alguien podrá quizás entreabrir puertas, ver más allá promesas, sucesiones. Yo sólo en él habito, de él espero, y hay suficiente asombro. En él estoy, me quede, renaciera.
Justicia Duerme el aldeano en un colchón de heno. El pescador de esponjas descansa sobre su mullidísima cosecha. ¿Dormirás tú, en lenta flotación, sobre papel escrito?
Residua
Corta la vida o larga, todo lo que vivimos se reduce a un gris residuo en la memoria. De los antiguos viajes quedan las enigmáticas monedas que pretenden valores falsos. De la memoria sólo sube un vago polvo y un perfume. ¿Acaso sea la poesía?