Deux poèmes relus ce matin un peu par hasard et qui n’ont pas grand chose à voir. Deux traductions en français d’une qualité inégale. Ils m’aident pourtant à commencer la journée malgré la fatigue et les maux.
Medialuz (César Vallejo)
He soñado una fuga. Y he soñado tus encajes dispersos en la alcoba. A lo largo de un muelle, alguna madre; y sus quince años dando el seno a una hora.
He soñado una fuga. Un “para siempre” suspirado en la escala de una proa; he soñado una madre; unas frescas matitas de verdura, y el ajuar constelado de una aurora.
A lo largo de un muelle… Y a lo largo de un cuello que se ahoga!
Los heraldos negros, 1918.
Demijour
J’ai revé d’une fugue. Et j’ai revé de tes dentelles éparses dans l’alcôve. Tout au long d’un quai, une mère ; et ses quinze ans allaitant l’heure.
J’ai revé d’une fugue. D’un “ pour toujours ” soupiré sur l’échelle d’une proue ; j’ai rêvé d’une mère ; de fraîches petites touffes vertes, et du trousseau constellé d’une aurore;
Tout au long d’un quai… et tout au long d’un cou qui se noie !
Les hérauts noirs. In Poésie complète. Traduction Gérard de Constanze. Flammarion, 1983.
Lo perdido ( Jorge Luis Borges )
¿Dónde estará mi vida, la que pudo haber sido y no fue, la venturosa o la de triste horror, esa otra cosa que pudo ser la espada o el escudo
y que no fue? ¿Dónde estará el perdido antepasado persa o el noruego, dónde el azar de no quedarme ciego, dónde el ancla y el mar, dónde el olvido
de ser quien soy? ¿Dónde estará la pura noche que al rudo labrador confía el iletrado y laborioso día,
según lo quiere la literatura? Pienso también en esa compañera que me esperaba, y que tal vez me espera.
El oro de los tigres, 1972.
Ce qui est perdu
Où est-elle ma vie, celle qui put Avoir été et ne fut pas, la chanceuse Ou celle de l’horreur triste, cette autre chose Qui aurait pu être l’épée ou l’écu
Et ne fut pas ? Où est-il l’ancêtre Perdu perse ou le norvégien Où le hasard de ne pas devenir aveugle, Où l’ancre et la mer, où l’oubli
D’être qui je suis ? Où est-elle la pure Nuit qui au rude laboureur confie Le jour illettré et laborieux
Selon le vœu de la littérature ? Je pense aussi à cette compagne Qui m’attendait, et qui peut-être m’attend.
L’or des tigres, 1972. Gallimard, 2014. Traduction Silvia Baron Supervielle.
Ludmila Oulitskaïa contre la guerre en Ukraine : « Le destin du pays est dirigé par la folie d’un seul homme »
Aujourd’hui, 24 février 2022, la guerre a éclaté. Je pensais que ma génération, celle qui est née pendant la Seconde Guerre mondiale, avait de la chance, et que nous allions vivre sans avoir connu de guerre jusqu’à notre mort qui serait, comme promis dans les Évangiles, « paisible, sans douleur et sans reproche ». Mais non. On dirait bien que ce ne sera pas le cas. Et nul ne sait à quoi vont aboutir les événements de cette journée dramatique.
Le destin du pays est dirigé par la folie d’un seul homme et de ses complices dévoués. On ne peut que faire des suppositions sur ce que les manuels d’histoire en diront dans cinquante ans. De la douleur, de la peur, de la honte – voilà les sentiments que l’on éprouve aujourd’hui.
De la douleur, parce que la guerre s’en prend au vivant, à l’herbe et aux arbres, aux animaux et à leur descendance, aux êtres humains et à leurs enfants.
De la peur, parce qu’il existe chez tous les êtres vivants un instinct de conservation biologique qui les pousse à protéger leur vie et celle de leur descendance.
De la honte, parce que la responsabilité des dirigeants de notre pays dans le développement de cette situation pouvant entraîner d’immenses malheurs pour toute l’humanité est évidente.
Cette responsabilité, nous la partageons tous nous aussi, qui sommes contemporains de ces événements dramatiques et qui n’avons pas su les prévoir ni les arrêter. Il faut absolument stopper cette guerre qui se déchaîne de plus en plus à chaque minute qui passe, et résister à la propagande mensongère dont tous les médias inondent notre population.
(Texte traduit du russe par Sophie Benech)
Ce n’était que la peste. Scénario. Traduction: Sophie Benech. Hors série Littérature, Gallimard, 2021. Moscou, 1939. Le biologiste Rudolf Mayer a parcouru plus de huit cents kilomètres pour présenter aux autorités ses recherches sur une souche hautement virulente de la peste. Ce n’est qu’après cette réunion qu’il comprend qu’il a été contaminé, et que toutes les personnes qu’il a croisées peuvent l’être également. La police soviétique déploie alors un très efficace plan de mise en quarantaine. Mais en ces années de Grandes Purges, une mise à l’isolement ressemble à une arrestation politique, et les réactions des uns et des autres peuvent être surprenantes. Ce texte date de 1988. Ludmila Oulitskaïa donne à voir ce qui peut se passer lorsqu’une épidémie éclate au cœur d’un régime totalitaire. Ce texte inédit a été découvert en Russie au printemps 2020.
Gabriel Boric, 36 ans, est devenu hier officiellement le plus jeune président de l’histoire du Chili. L’ancien leader étudiant, héritier de la révolte sociale de 2019, a fait de sa cérémonie d’investiture à Valparaíso, siège du Parlement, un symbole de son projet de changement en profondeur. Il a rendu hommage à l’ancien président Salvador Allende : « Comme l’avait prédit Salvador Allende il y a presque cinquante ans, nous voici de nouveau, chers compatriotes, en train d’ouvrir de grandes avenues où passeront l’homme et la femme libres pour construire une société meilleure. Vive le Chili ! » Son gouvernement est majoritairement composé de femmes (14 sur 24), notamment aux postes régaliens de l’intérieur, la défense ou des affaires étrangères. La moyenne d’âge est de 42 ans. La tâche est immense et très difficile.
Le 11 septembre 1973, jour du coup d’état militaire, à 10h15, Salvador Allende fit à Radio Magallanes son dernier discours à la nation chilienne:
«Sigan ustedes sabiendo que, mucho más temprano que tarde, se abrirán las grandes alamedas por donde pase el hombre libre para construir una sociedad. ¡Viva Chile, viva el pueblo, vivan los trabajadores!»
Gabriel Boric a cité dans son discours un vers du grand poète chilien, Vicente Huidobro (1893-1948) , un des quatre grands de la poésie chilienne du XX ème siècle (avec Pablo Neruda, Gabriela Mistral et Pablo de Rokha), le fondateur du “Créationnisme”: ” el adjetivo, cuando no da vida, mata.”
Arte poética (Vicente Huidobro)
Que el verso sea como una llave que abra mil puertas. Una hoja cae; algo pasa volando; cuanto miren los ojos creado sea, y el alma del oyente quede temblando.
Inventa mundos nuevos y cuida tu palabra; el adjetivo, cuando no da vida, mata. Estamos en el ciclo de los nervios. El músculo cuelga, como recuerdo, en los museos; mas no por eso tenemos menos fuerza : el vigor verdadero reside en la cabeza.
Por qué cantáis la rosa, ¡ oh Poetas ! hacedla florecer en el poema; sólo para nosotros viven todas las cosas bajo el Sol.
Carlos Álvarez Cruz est né le 27 décembre 1933 à Jérez de la Frontera (Cádiz). Son père, capitaine des Gardes d’Assaut, fut fusillé à Séville sur l’ordre du général rebelle Gonzalo Queipo de Llano (1875-1951). Celui-ci, responsable de l’exécution de 3 000 à 6 000 personnes après la prise de la ville par les franquistes, est encore enterré aujourd’hui dans la basilique de la Macarena à Séville. En 1941, Carlos Álvarez s’installe avec sa famille à Madrid. Il fait des études secondaires, puis devient employé de banque. Militant du PCE (Partido Comunista de España), il est arrêté en avril 1957. Mis au secret et jugé pour propagande illégale, il bénéficie d’un non-lieu. Victime de la censure d’état, ses poèmes ne sont édités qu’au Danemark et en France. Arrêté à nouveau en 1963 pour avoir publié dans la presse étrangère une lettre de protestation contre l’exécution du dirigeant communiste Julián Grimau, il est condamné en 1964, puis amnistié en 1965. Son premier livre paraît en Espagne en 1969. Le 20 novembre 1975, à la mort du général Franco, il purge à la prison de Carabanchel une condamnation de quatre ans et deux mois pour s’être montré solidaire avec les dirigeants du syndicat Comisiones Obreras, condamnés lors du procès 1001. Il était rédacteur publicitaire. La maison d’édition Adeshoras a publié en 2016 Los sueños, el amor, las intenciones, son œuvre poétique complète en deux tomes. Il est décédé à Madrid le 27 février 2022.
Guernica
Hoy ha llovido abril sobre mi sangre… la guerra dicen que terminó hace muchos años, el paisaje es aquí diferente: tiene sujeto a la maleza el sombrío color de los mineros, pero es verde el metal; pasan los ríos cansados del trabajo, vestidos con el traje común de las faenas; nada sugiere la tarjeta postal para el disfrute del que paga con marcos, libras, dólares… Y porque ocurre que el lunes era día veintiséis, hoy miro al cielo, escucho si vuelven los aviones de Guernica, si proyecta la cruz gamada el sol sobre los campos, sobre este campo herido… busco, descubro en mis raíces, encuentro que también en Euzkadi está mi patria… que también en Guernica está mi sangre…
Guernica
Aujourd’hui avril retentit dans mon sang… On dit que la guerre est finie depuis longtemps, et le paysage d’ici est différent. Dans ces broussailles il a gardé la couleur sombre des mineurs, car le métal est vert. Passent les rivières fatiguées par le travail et revêtues des vêtements anonymes de l’effort. Rien ne suggère la carte postale des vacances de celui qui paie en marks, en livres, ou en dollars… Tout est motivé par la date anniversaire, un jeudi, le 26, aussi, je regarde le ciel, j’écoute si les avions reviennent sur Guernica, et si l’ombre de la croix gammée ne plane pas sur les campagnes, sur cette terre blessée… Je cherche et je découvre au plus profond de moi, au fond de mes racines, que ma patrie se nomme aussi Euzkadi, et que mon sang est aussi à Guernica…
Ana Merino (Madrid, 1971) vient de publier son deuxième roman, Amigo. Le premier, El mapa de los afectos, avait obtenu le Prix Nadal en 2020.
Il y a deux ans, Ana Merino, professeure à l’Université de Iowa, est invitée à consulter les archives de Joaquín Amigo, conservées par sa petite fille María à Madrid. Cet écrivain participa avec son ami Federico García Lorca et Manuel de Falla aux réunions de El Rinconcillo, un cercle littéraire qui se réunissait au Café Alameda de Grenade au début des années 20. Il fut aussi un des animateurs avec Federico de la revue littéraire, gallo, qui publia deux numéros en février et en avril 1928. Il assista aussi avec d’autres amis à la lecture que fit Federico García Lorca de sa pièce, Yerma, à la Huerta de San Vicente, la maison de campagne de la famille du poète, à l’été 1934. Celui-ci lui dédia le poème Dosmarinos en la orilla de Canciones 1921-1924.
Joaquín Amigo Aguado (Grenade 1899 – Ronda, 1936) avait suivi les cours de José Ortega y Gasset. Catholique pratiquant et d’idéologie conservatrice, il était professeur de philosophie au lycée Giner de los Ríos de Ronda. Au cours de la Guerre Civile, des miliciens des comités révolutionnaires de la ville pour se venger de la répression nationaliste l’arrêtèrent le 24 août et le jetèrent du Puente Nuevo (98 mètres au-dessus des gorges du Guadalevín) le 27 août 1936, neuf jours après l’assassinat de son ami Federico García Lorca à Viznar. On n’a jamais retrouvé les corps des deux amis.
Ana Merino a pu étudier les archives de Joaquín Amigo à partir du 25 juin 2020. Elle a trouvé des lettres inédites de Federico García Lorca, des cartes postales de Federico et de Salvador Dalí, envoyées de Cadaqués. Elle a tiré de ses recherches un roman qui met en valeur l’amitié entre les deux hommes. Dans une des lettres retrouvées, García Lorca dit à Joaquín Amigo : «Saluda a los amigos, ya sean ingratos o sean amigos míos de verdad. Basta que sean de Granada para que yo los quiera. No hay nada en el mundo como Granada» Le roman fait revivre aussi le poète Luis Rosales (1910 – 1992). Federico García Lorca se réfugia dans la maison familiale de celui-ci, calle Angulo à Grenade, entre le 9 et le 16 août avant d’être arrêté et assassiné. Le poète et critique Felix Grande (1937 – 2014), de famille et de convictions républicaines, publia en 1987 La calumnia. De cómo a Luis Rosales, por defender a Federico García Lorca, lo persiguieron hasta la muerte (Mondadori). Il défendait Luis Rosales, poète et phalangiste comme ses frères, accusé à tort par certains exilés républicains d’avoir livré son ami aux bourreaux.
Dos marinos en la orilla
A Joaquín Amigo
I
Se trajo en el corazón un pez del Mar de la China.
A veces se ve cruzar diminuto por sus ojos.
Olvida siendo marino los bares y las naranjas.
Mira al agua.
II
Tenía la lengua de jabón. Lavó sus palabras y se calló.
Mundo plano, mar rizado, cien estrellas y su barco.
Vio los balcones del Papa y los pechos dorados de las cubanas.
Mira al agua.
Canciones 1921-1924.
Deux marins au bord de l’eau.
I
Il rapportait en son cœur un poisson des Mers de Chine.
Parfois on le voit passer minuscule dans ses yeux.
Il oublie la Marine et les bars et les oranges.
Il regarde l’eau.
II
D’une langue de savon il lava ses mots et se tut.
Monde uni, mer frisée cent étoiles, son navire.
Il a vu les balcons du Pape et les seins dorés des Cubaines.
Il regarde l’eau.
Poésies, tome II. Collection Poésie/Gallimard n° 2. 1966. Traduction : André Belamich et Pierre Darmangeat.
Je viens de terminer la biographie de Robert Desnos par Anne Egger (Fayard, 1 166 p., 42 €)
Biographie à l’américaine : 1 166 pages. Il n’ y manque aucun détail. J’apprécie la minutie du travail, le soin apporté à l’étude des sources, la somme des témoignages réunis. Il manque peut-être une réflexion synthétique qui nous aurait permis de saisir plus profondément la personnalité complexe du poète.
On ne peut qu’admirer la trajectoire de ce magnifique créateur qui a marqué l’entre-deux-guerres. Il est au centre des expériences surréalistes en 1922 avec les « sommeils hypnotiques », mais ce n’est pas une lubie pour lui. Il s’intéressera aussi aux rêves des auditeurs à la radio, et même à ceux de ses compagnons d’infortune en camp de concentration.
C’est un amoureux de Paris comme Baudelaire, Apollinaire ou Nerval.
Robert Desnos a exercé toutes sortes de métiers : commis dans une droguerie, gérant d’immeubles, secrétaire d’un écrivain, dessinateur, scénariste, auteur de chansons, de réclames radiophoniques, et surtout journaliste pour la presse et pour la radio.
Il n’a pas fait d’études supérieures puisqu’il acquitté l’école Turgot dès 16 ans (1916). Il s’est pourtant forgé en autodidacte une grande culture : littérature, théâtre, cinéma, musique classique ou populaire, aviation, sciences.
Il devient l’ami de personnalités très diverses : Henri Jeanson, Armand Salacrou, Paul Deharme, Jean-Louis Barrault, Théodore Fraenkel (son légataire universel), Paul Éluard, Jacques Prévert, André Masson, Georges Malkine, Darius Milhaud, Arthur Honegger, Ernest Hemingway, John Dos Passos, Federico García Lorca, Pablo Neruda, Alejo Carpentier, Miguel Ángel Asturias.
Il refuse tout embrigadement : “Je me refuse à accepter des mots d’ordre”, dit-il en 1929.
Il reste comme rédacteur littéraire au journal Aujourd’hui, crée par Henri Jeanson en 1940, même quand le collaborateur Georges Suarez en prend la direction. Cela lui permet de transmettre des informations précieuses au réseau Agir dont il fera partie dès 1942. Il aide à la confection de fausses pièces d’identité. Il publie ses poèmes dans les revues clandestines ( Poésie 42, L’honneur des poètes, Confluences, Poésie 44 entre autres )
Il aide ses amis en difficulté. Il réussit ainsi à faire hospitaliser Antonin Artaud à Rodez, alors qu’il se mourait à l’asile de Ville-Evrard. Il héberge le jeune Alain Brieux qui veut échapper au STO.
Arrêté le 22 février 1944, il meurt au camp de Terezin, en Tchécoslovaquie le 8 juin 1945.
“Ce qui importe ce n’est pas ce qui reste, c’est ce qu’on est” (Robert Desnos).
On peut écouter Les Nuits de France Culture par Mathieu Bénézet, programme diffusé le 07/09/2007 (1h16).
Maréchal Ducono se page avec méfiance, Il rêve à la rebiffe et il crie au charron Car il se sent déjà loquedu et marron Pour avoir arnaqué le populo de France.
S’il peut en écraser, s’étant rempli la panse, En tant que maréchal à maousse ration, Peut-il être à la bonne, ayant dans le croupion Le pronostic des fumerons perdant patience ?
À la péter les vieux et les mignards calenchent, Les durs bossent à cran et se brossent le manche : Maréchal Ducono continue à pioncer.
C’est tarte, je t’écoute, à quatre-vingt-six berges, De se savoir vomi comme fiotte et faux derge Mais tant pis pour son fade, il aurait dû clamser.
Messages, n°11, 1944. Á la caille. Messages n°11, 1944.
Petrus d’Aubervilliers (Robert Desnos)
Parce qu’il est bourré d’aubert et de bectanse L’auverpin mal lavé, le baveux des pourris Croit-il encor farcir ses boudins par trop rances Avec le sang des gars qu’on fusille à Paris ?
Pas vu ? Pas pris ! Mais il est vu, donc il est frit, Le premier bec de gaz servira de potence. Sans préventive, sans curieux et sans jury Au demi-sel qui nous a fait payer la danse.
Si sa cravate est blanche elle sera de corde. Qu’il ait des roustons noirs ou bien qu’il se les morde, Il lui faudra fourguer son blaze au grand pégal.
Il en bouffe, il en croque, il nous vend, il nous donne Et, à la Kleberstrasse, il attend qu’on le sonne Mais nous le sonnerons, nous, sans code pénal.
À la caille. Messages n°11, 1944.
Ce coeur qui haïssait la guerre (Robert Desnos)
Ce coeur qui haïssait la guerre voilà qu’il bat pour le combat et la bataille ! Ce coeur qui ne battait qu’au rythme des marées, à celui des saisons, à celui des heures du jour et de la nuit, Voilà qu’il se gonfle et qu’il envoie dans les veines un sang brûlant de salpêtre et de haine. Et qu’il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent Et qu’il n’est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne Comme le son d’une cloche appelant à l’émeute et au combat. Écoutez, je l’entends qui me revient renvoyé par les échos. Mais non, c’est le bruit d’autres coeurs, de millions d’autres coeurs battant comme le mien à travers la France. Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces coeurs, Leur bruit est celui de la mer à l’assaut des falaises Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d’ordre : Révolte contre Hitler et mort à ses partisans ! Pourtant ce coeur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons, Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères Et des millions de Francais se préparent dans l’ombre à la besogne que l’aube proche leur imposera. Car ces coeurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté au rythme même des saisons et des marées, du jour et de la nuit.
Poème signé Pierre Andier, choisi dans l’oeuvre de Desnos pour figurer au mémorial des Martyrs de la déportation dans l’île de la Cité.
L’Honneur des poètes, 14 juillet 1943. Anthologie de la résistance préparée par Paul Éluard et Pierre Seghers. éditions de Minuit. Repris dans Destinée arbitraire, Paris, Gallimard, 1975.
Recuérdalo tú y recuérdalo a otros, Cuando asqueados de la bajeza humana, Cuando iracundos de la dureza humana: Este hombre solo, este acto solo, esta fe sola. Recuérdalo tú y recúerdalo a otros.
En 1961 y en ciudad extraña, Más de un cuarto de siglo Después. Trivial la circunstancia, Forzado tú a pública lectura, Por ella con aquel hombre conversaste: Un antiguo soldado En la Brigada Lincoln.
Veinticinco años hace, este hombre, Sin conocer tu tierra, para él lejana Y extraña toda, escogió ir a ella Y en ella, si la ocasión llegaba, decidió apostar su vida, Juzgando que la causa allá puesta al tablero Entonces, digna era de luchar por la fe que su vida llenaba.
Que aquella causa aparezca perdida, Nada importa; Que tantos otros, pretendiendo fe en ella Sólo atendieran a ellos mismos, Importa menos. Lo que importa y nos basta es la fe de uno.
Por eso otra vez hoy la causa te aparece Como en aquellos días: Noble y tan digna de luchar por ella. Y su fe, la fe aquella, él la ha mantenido A tráves de los años, la derrota, Cuando todo parece traicionarla. Mas esa fe, te dices, es lo que sólo importa.
Gracias, Compañero, gracias Por el ejemplo. Gracias porque me dices que el hombre es noble. Nada importa que tan pocos lo sean: Uno, uno tan sólo basta Como testigo irrefutable de toda la nobleza humana.
Desolación de la químera. Joaquín Mortiz, México, 1962.
Luis Cernuda séjourne à San Francisco en 1961-1962. Il donne des cours à l’Université de Californie et récite ses poèmes en public. Á la fin d’une de ces séances au San Francisco State College, un ancien brigadiste est venu le saluer.
Il a commencé à écrire ce poème à San Francisco en décembre 1961 et il le termine en avril 1962. Fatigué et triste, il meurt le 5 novembre 1963 (à 61 ans) à Mexico.
La Brigade Abraham Lincoln ou XVe Brigade internationale a été constituée par des volontaires des États-Unis qui ont servi dans la guerre civile espagnole dans les Brigades internationales.
Luis García Montero évoque aujourd’hui ce poème dans un article de Infolibre: Buen momento para volver a ver Maixabel.
C’est une chose étrange à la fin que le monde Un jour je m’en irai sans en avoir tout dit Ces moments de bonheur ces midi d’incendie La nuit immense et noire aux déchirures blondes
Rien n’est si précieux peut-être qu’on le croit D’autres viennent Ils ont le cœur que j’ai moi-même Ils savent toucher l’herbe et dire je vous aime Et rêver dans le soir où s’éteignent des voix
D’autres qui referont comme moi le voyage D’autres qui souriront d’un enfant rencontré Qui se retourneront pour leur nom murmuré D’autres qui lèveront les yeux vers les nuages
Il y aura toujours un couple frémissant Pour qui ce matin-là sera l’aube première Il y aura toujours l’eau le vent la lumière Rien ne passe après tout si ce n’est le passant
C’est une chose au fond que je ne puis comprendre Cette peur de mourir que les gens ont en eux Comme si ce n’était pas assez merveilleux Que le ciel un moment nous ait paru si tendre
Oui je sais cela peut sembler court un moment Nous sommes ainsi faits que la joie et la peine Fuient comme un vin menteur de la coupe trop pleine Et la mer à nos soifs n’est qu’un commencement
Mais pourtant malgré tout malgré les temps farouches Le sac lourd à l’échine et le cœur dévasté Cet impossible choix d’être et d’avoir été Et la douleur qui laisse une ride à la bouche
Malgré la guerre et l’injustice et l’insomnie Où l’on porte rongeant votre cœur ce renard L’amertume et Dieu sait si je l’ai pour ma part Porté comme un enfant volé toute ma vie
Malgré la méchanceté des gens et les rires Quand on trébuche et les monstrueuses raisons Qu’on vous oppose pour vous faire une prison De ce qu’on aime et de ce qu’on croit un martyre
Malgré les jours maudits qui sont des puits sans fond Malgré ces nuits sans fin à regarder la haine Malgré les ennemis les compagnons de chaînes Mon Dieu mon Dieu qui ne savent pas ce qu’ils font
Malgré l’âge et lorsque soudain le cœur vous flanche L’entourage prêt à tout croire à donner tort Indiffèrent à cette chose qui vous mord Simple histoire de prendre sur vous sa revanche
La cruauté générale et les saloperies Qu’on vous jette on ne sait trop qui faisant école Malgré ce qu’on a pensé souffert les idées folles Sans pouvoir soulager d’une injure ou d’un cri
Cet enfer Malgré tout cauchemars et blessures Les séparations les deuils les camouflets Et tout ce qu’on voulait pourtant ce qu’on voulait De toute sa croyance imbécile à l’azur
Malgré tout je vous dis que cette vie fut telle Qu’à qui voudra m’entendre à qui je parle ici N’ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci Je dirai malgré tout que cette vie fut belle
Prépublication dans la revue Europe (1 avril 1954)
Le deuxième recueil de poèmes de César Vallejo, Trilce, a été publié en octobre 1922, il y a cent ans (Talleres Tipográficos de la Penitenciaria). Il a été tiré à deux cents exemplaires. 121 pages de textes et un prologue d’Antenor Orrego (1892-1960), ami du poète. Les 77 poèmes ne portent pas de titre. Ils sont dénombrés de I à LXXVII. La poésie dépasse toute anecdote.
Le premier livre de César Vallejo, Los heraldos negros, date de 1919. On sent encore dans ces poèmes, rédigés entre 1915 et 1918, l’influence du modernisme.
Le mot Trilce est un mot inconnu. On demanda un jour à Vallejo ce qu’il signifiait. Il répondit :« Ah, mais ça ne veut rien dire. Je ne trouvais aucun mot qui ait la dignité d’un titre, alors je l’ai inventé : Trilce. Ce n’est pas un joli mot ? » («Ah, pues Trilce no quiere decir nada. No encontraba, en mi afán, ninguna palabra con dignidad de título, y entonces la inventé: Trilce. ¿No es una palabra hermosa? ») D’autres explications ont été données. En espagnol, on entend d’abord deux états : Triste, Dulce. Triste et Doux.
Ces textes furent écrits pendant une période particulièrement dramatique de la vie du poète. Sa mère meurt en août 1918. Il connaît une rupture amoureuse douloureuse (avec la très jeune Otilia Villanueva) en mai 1919. Son ami, l’écrivain Abraham Valdelomar ,(1888-1919) meurt le 3 novembre 1919 après une chute accidentelle. Il perd son poste d’enseignant à la fin de 1919. Il est emprisonné à Trujillo pendant 112 jours (du 6 novembre 1920 au 26 février 1921), sous l’accusation d’être un agitateur et d’avoir incendié une maison à Santiago de Chuco, sa ville natale. Il s’exilera en France le 17 juin 1923 et arrivera à Paris le 13 juillet.
César Vallejo a commencé à écrire Trilce en 1918. La plupart des poèmes datent de 1919 et les deux derniers de 1922. Il s’agit du sommet de l’oeuvre du poète péruvien. Il est en avance sur toutes les avant-gardes. On remarque une rupture avec Los heraldos negros. Ses poèmes sont toujours marqués par le pessimisme, mais l’angoisse et la désolation apparaissent avec un nouveau langage poétique, loin de toute influence moderniste. La langue se désarticule. La syntaxe disparaît parfois. Ce livre donne l’impression d’un monde chaotique et angoissant. Il deviendra l’un des plus importants de la poésie en langue espagnole du XX ème siècle.
«El libro ha nacido en el mayor vacío. Soy responsable de él. Asumo toda la responsabilidad de su estética. Hoy, y más que nunca quizás, siento gravitar sobre mí una hasta ahora desconocida obligación sacratísima, de hombre y de artista: ¡la de ser libre! Si no he de ser hoy libre, no lo seré jamás. Siento que gana el arco de mi frente con su más imperativa curva de heroicidad. Me doy en la forma más libre que puedo y ésta es mi mayor cosecha artística. ¡Dios sabe hasta dónde es cierta y verdadera mi libertad! ¡Dios sabe cuánto he sufrido para que el ritmo no traspasara esa libertad y cayera en libertinaje! ¡Dios sabe hasta qué bordes espeluznantes me he asomado, colmado de miedo, temeroso de que todo se vaya a morir a fondo para que mi pobre ánima viva!» (Carta enviada a Antenor Orrego y citada por su amigo José Carlos Mariátegui. Siete ensayos de interpretación de la realidad peruana. En El proceso de la literatura. Lima, 1928.)
En 1930, il fut publié en Espagne (Compañia Ibero-Americana de Publicaciones) avec un prologue de José Bergamín et un poème de Gerardo Diego.
III
Las personas mayores ¿a qué hora volverán? Da las seis el ciego Santiago, y ya está muy oscuro.
Madre dijo que no demoraría.
Aguedita, Nativa, Miguel, cuidado con ir por ahí, por donde acaban de pasar gangueando sus memorias dobladoras penas, hacia el silencioso corral, y por donde las gallinas que se están acostando todavía, se han espantado tanto. Mejor estemos aquí no más. Madre dijo que no demoraría.
Ya no tengamos pena. Vamos viendo los barcos ¡el mío es más bonito de todos! con los cuales jugamos todo el santo día, sin pelearnos, como debe de ser: han quedado en el pozo de agua, listos, fletados de dulces para mañana.
Aguardemos así, obedientes y sin más remedio, la vuelta, el desagravio de los mayores siempre delanteros dejándonos en casa a los pequeños, como si también nosotros no pudiésemos partir.
Aguedita, Nativa, Miguel? Llamo, busco al tanteo en la oscuridad. No me vayan a haber dejado solo, y el único recluso sea yo.
Trilce, 1922.
III
Les grandes personnes à quelle heure reviendront-elles ? L’aveugle Santiago sonne six heures et il fait déjà très sombre.
Mère a dit qu’elle ne tarderait pas.
Aguedita, Nativa, Miguel, attention à ne pas aller par là, par où viennent de passer en nasillant leurs souvenirs d’accablantes âmes en peine, vers la basse-cour silencieuse, et par où les poules qui, en sont encore à se coucher, se sont tant effrayées. Il vaut mieux que nous restions ici simplement. Mère a dit qu’elle ne tarderait pas.
N’ayons plus de peine. Allons voir les bateaux, le mien est le plus beau de tous ! Ceux avec quoi nous jouons toute la sainte journée, sans nous disputer, comme il se doit : ils sont restés dans le bassin, tout prêts, chargés de sucreries pour demain.
Attendons ici, obéissants et soumis le retour, le dédommagement des adultes qui toujours vont devant nous laissant à la maison, nous les petits, comme si nous ne pouvions partir aussi.
Aguedita, Nativa, Miguel ? J’appelle, je cherche à tâtons dans l’obscurité. Pourvu qu’ils ne m’aient pas abandonné et que le seul reclus ce soit moi.
Cette semaine, j’ai acheté les trois livres disponibles d’Edith Bruck :
Edith Bruck, Le pain perdu. Traduction: René de Ceccatty. Éditions du sous-sol.
Edith Bruck, Pourquoi aurais-je survécu ? Choix de textes, traduction de l’italien et préface de René de Ceccatty. Rivages poche, collection « Petite Bibliothèque ».
Edith Bruck, Qui t’aime ainsi (Chi ti ama cosi). Traduction: Patricia Amardeil. Points.
Edith Steinschreiber est née le 3 mai 1931 dans un petit village de Hongrie, Tiszabercel. Elle fait partie d’une famille juive pauvre de huit enfants. Á l’aube du 8 avril 1944, on l’emmène avec sa famille dans le ghetto de Sátoraljaújhely. Le 23 mai, ils sont déportés au camp d’Auschwitz. Elle est séparée de ses parents et de son frère Laci. Elle ne les verra plus. Elle se retrouve avec sa soeur Eliz, 16 ans, en transit à Birkenau. Son numéro: 11152. Elles sont transférées au camp de Kaufering, une annexe de Dachau, puis dans le camp de Landsberg, et ensuite à Dachau et à Christianstadt. Elles arrivent enfin après une “marche de la mort” à Bergen-Balsen. Elle pèse alors 25 kilos. Les deux soeurs survivent jusqu’à l’arrivée des Américains. 430 000 juifs hongrois furent déportés à Auschwitz entre le 16 mai et le 9 juillet 1944.
Edith revient en Hongrie, retrouve les survivants de sa famille, puis part en Tchécoslovaquie. Elle se rend en Israël où elle retrouve deux de ses soeurs et son frère. Elle y vit difficilement. Elle se marie trois fois (elle porte successivement le nom de ses trois premiers maris, Grün, Roth, Bruck). Elle finit par quitter Israël en 1952. Elle rejette toute discipline et refuse de faire le service militaire. Elle devient danseuse et chanteuse et finit par s’établir en Italie. Elle épouse le poète et cinéaste Nelo Risi (1920-2015), frère du réalisateur Dino Risi (1916-2008). Il sera son mari pendant soixante ans. Elle a traduit en italien de nombreux écrivains hongrois (Attila József, Miklós Radnóti, Gyula Illyés, Ruth Feldman). Elle a aussi travaillé comme scénariste et réalisatrice pour la RAI.
Elle publie Qui t’aime ainsi (1959) en Italie, puis Lettre à ma mère (Lettera alla madre, 1988) et SignoraAuschwitz (Signora Auschwitz: il dono della parola, 1999) qui forment une trilogie. En 2021, Le pain perdu connaît un grand succès. Le livre reçoit le prix Strega Giovani et le prix Viareggio. Il se termine par une Lettre à Dieu. Cela lui vaut une visite du pape François à son domicile le 20 février 2021.
René de Ceccaty a choisi avec Edith Bruck les poèmes de Pourquoi aurais-je survécu? Ils sont précis, sobres, presque secs. Ils apparaissent par ordre chronologique sauf les quatre premiers que je reproduis ici.
Pendant ce temps, ici, en France, un certain Z. crache son venin à la radio et sur les plateaux de télévision.
Pourquoi aurais-je survécu
Pourquoi aurais-je survécu sinon pour représenter les fautes, surtout aux personnes proches ? De tant de fautes qu’elle auront une, la plus grande, sera le regret d’avoir fait du mal, à moi qui ait tant supporté. Avec moi qui suis différente des autres et qui porte en moi six millions de morts qui parlent ma langue qui demandent à l’homme de se souvenir à l’homme qui a si peu de mémoire. Pourquoi aurais-je survécu sinon pour témoigner avec toute ma vie avec chacun de mes gestes avec chacune de mes paroles avec chacun de mes regards. Et quand se terminera cette mission ? Je suis lasse de ma présence accusatrice, le passé est une arme à double tranchant et je perds tout mon sang. Quand viendra mon heure je laisserai en héritage peut-être un écho à l’homme qui oublie et continue et recommence…
Nous
Pour nous les survivants c’est un miracle chaque jour si nous aimons, nous aimons dur comme si la personne aimée pouvait disparaître d’un moment à l’autre et nous aussi.
Pour nous les survivants le ciel ou est très beau ou est très laid, les demi-mesures les nuances sont interdites.
Avec nous les survivants il faut se montrer précautionneux parce qu’un simple regard de travers ce qu’il y a de plus banal va s’ajouter à d’autres terribles et toute souffrance fait partie d’une UNIQUE qui palpite dans notre sang.
Nous ne sommes pas des gens normaux nous avons survécu pour les autres à la place d’autres. La vie que nous vivons pour nous rappeler et nous nous rappelons pour vivre n’est pas qu’à nous. Laissez-nous… Nous ne sommes pas seuls.
Après
Même les rares survivants des camps nazis s’en vont et après ? Qui pourra jamais continuer à témoigner au nom de ceux qui ont vécu l’indicible ? Leurs enfants ? Souvent ils ont été épargnés par leurs parents. Les petit-fils fuient presque l’expérience de leurs grands-parents pour vivre affranchis de cette éternelle cage de tamponnés chiffrés. Et une fois nous disparus, les mystificateurs et les nouveaux haïsseurs, les négationnistes se multiplieront, « Tu te rends compte, ils nient déjà », me disait Primo Levi, « avec nous encore en vie ! » je m’en suis rendu compte oui, plus que jamais aujourd’hui !
Une promenade avec Primo Levi
Pour toi si piémontais pour tes pas presque de clandestin pour tes yeux éblouis par tant de lumière comme du prisonnier qui vient d’être libéré Rome était une ville trop ensoleillée.
« Il y a une atmosphère de vacances, de fête, de marché », me disais-tu, de tes lèvres serrées et incrédules, jetant un regard scrutateur et furtif sur les vitrines tentatrices que tu t’interdisais, Pourquoi Primo ?
La normalité désirée ne nous est plus possible dans la maison, dans la rue, avec les amis les épouses, les maris, les amants – une existence a été marquée qui peut finir aussi au pied d’un escalier comme la tienne, quand tu as cédé au clin d’œil du vieux malin nous appauvrissant nous et tes innombrables lecteurs, Pourquoi Primo ?
Ta figure tutélaire nous manque, Nécessaire comme l’eau à l’assoiffé, La prière au croyant, La lumière au non-voyant. Notre devoir est De vivre et jamais de mourir ! Pourquoi Primo ?