Los pasos lejanos
Mi padre duerme. Su semblante augusto
figura un apacible corazón;
está ahora tan dulce…
si hay algo en él de amargo, seré yo.
Hay soledad en el hogar; se reza;
y no hay noticias de los hijos hoy.
Mi padre se despierta, ausculta
la huida a Egipto, el restañante adiós.
Está ahora tan cerca;
si hay algo en él de lejos, seré yo.
Y mi madre pasea allá en los huertos,
saboreando un sabor ya sin sabor.
Está ahora tan suave,
tan ala, tan salida, tan amor.
Hay soledad en el hogar sin bulla,
sin noticias, sin verde, sin niñez.
Y si hay algo quebrado en esta tarde,
y que baja y que cruje,
son dos viejos caminos blancos, curvos.
Por ellos va mi corazón a pie.
Los Heraldos Negros, 1918.
[Dante Liano (1948), écrivain guatémaltèque, utilise les quatre derniers vers de ce poème de Vallejo comme épigraphe de son roman Réquiem por Teresa, publié cette année dans la collection de poche du Fondo de Cultura económica.]
Les pas lointains
Mon père dort. Son auguste visage
figure un cœur serein ;
il est maintenant si doux…
s’il est en lui quelque chose d’amer, ce doit être moi.
Il y a de la solitude au foyer ; on prie ;
et pas de nouvelles des enfants aujourd’hui.
Mon père s’éveille, ausculte
la fuite en Égypte, l’adieu apaisant.
Il est maintenant si proche ;
s’il est en lui quelque chose de lointain, ce doit être moi.
Et ma mère se promène là-bas dans les jardins,
savourant une saveur désormais sans saveur.
Elle est maintenant si suave,
si aile, si départ, si amour.
Il y a de la solitude au foyer sans tumulte,
sans nouvelles, sans vert, sans enfance.
Et s’il est quelque chose de brisé ce soir,
et qui descend et qui grince,
ce sont deux vieux chemins blancs, courbés.
Mon cœur les parcourt à pied.
(Traduit par Nicole Réda-Euvremer)