La poétesse péruvienne Blanca Varela est une des grandes figures de la poésie latino-américaine.
Elle s’installe à Paris en 1949. Octavio Paz l’introduit à la vie artistique et littéraire parisienne. Elle se lie d’amitié avec Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Henri Michaux, Fernand Léger, Alberto Giacometti.
Après un long séjour en France, elle vit ensuite à Florence puis à Washington où elle travaille sur des traductions et écrit des articles pour les journaux. En 1962, elle revient à Lima.
Blanca Varela est la première femme qui ait obtenu le Prix international de Poésie Federico Garcia Lorca de la Ville de Grenade en 2006. Elle a aussi reçu le Prix de Poésie ibéroaméricaine Reina Sofía en 2007.
Elle a été mariée à Fernando de Szyszlo (1925 – 2017), un des peintres péruviens contemporains les plus importants.
Elle est décédée le 12 mars 2009 à Lima à 82 ans. Son corps a été incinérée et ses cendres ont été dispersées dans la baie de Paracas.
Curriculum vitae
digamos que ganaste la carrera
y que el premio
era otra carrera
que no bebiste el vino de la victoria
sino tu propia sal
que jamás escuchaste vítores
sino ladridos de perros
y que tu sombra
tu propia sombra
fue tu única
y desleal competidora.
Canto villano. Lima, Ediciones Arybalo, 1978.
Curriculum Vitae
Disons que tu as gagné la course
et que le prix
était une autre course
que tu n’as pas bu le vin de la victoire
mais ton propre sel
que tu n’as jamais écouté de vivats
mais des aboiements de chiens
et que ton ombre
ta propre ombre fut ta seule
et déloyale concurrente.
Traduction : Stéphane Chaumet.
Hundo la mano en la arena y encuentro la vértebra perdida. La extravío al instante. Sombra de marfil, desgranada. Mi padre sonríe. De este lado del mar la espuma es oscura. Huele a fiera me dice la pequeña amiga. El mar huele a vida y a muerte le respondo, supongamos que es así.
La salud aferrada a la roca. Piedra sensible a la luz. El cazador carece de manos y pies. Es ciego y desea. Y su deseo es el bosque bajo el agua, poblado de sexos en flor o de flores maestras que horadan el silencio con sus grandes picos rojos y lentos.
El libro de barro. Madrid, Ediciones del Tapir, 1993.
J’enfonce la main dans le sable et je trouve la vertèbre perdue. Je l’égare aussitôt. Ombre d’ivoire, exsangue. Mon père sourit. De ce côté-ci de la mer l’écume est noire. Elle sent le fauve me dit la petite amie. La mer sent la vie et la mort je lui réponds. Supposons que ce soit vrai.
La santé aggrippée à la roche. Pierre sensible à la lumière. Mains et pieds font défaut au chasseur. Il est aveugle et en proie au désir. Et son désir c’est la forêt sous l’eau, peuplée de sexes en fleur ou de maîtresses fleurs qui percent le silence de leurs grands becs rouges et lents.
Le livre d’argile. Indigo, 2008. Traduction Claude Couffon.
¿Qué dice ese cuerpo inmóvil en su movimiento? Está solo. Lo otro es aire alrededor de la isla que danza.
Digo isla y pienso en mar. Digo mar y pienso en isla. ¿Son lo mismo?
Se suceden vacío continuo y plenitud sin nombre,
El libro de barro. Madrid, Ediciones del Tapir, 1993.
Que dit le corps immobile dans son mouvement ? Il est seul. L’air environnant l’île qui danse est ce qui est autre.
Je dis l’île et je pense : la mer. Je dis la mer et je pense : l’île. Sont-elles une seule et même chose ?
Vide continuel et plénitude sans nom se succèdent.
Le livre d’argile. Indigo, 2008. Traduction Claude Couffon.