J’ai passé plusieurs jours à lire un livre de l’historien anglais Paul Preston, professeur d’études contemporaines en espagnol à la London School of Economics, maintenant à la retraite: Une guerre d’extermination. Espagne, 1936-1945 (The Spanish : Inquisition and Extermination in Twentieth-Century Spain, 2012). Première édition Belin/ Humensis, 2016. En poche: Éditions Tallandier. Collection Texto, 2019. On remarquera la traduction du titre en français qui évite l’emploi du terme Holocauste utilisé en France seulement dans le cadre de l’extermination nazie.
Cette lecture a été très douloureuse car elle décrit dans le détail la terreur et les atrocités innombrables de la guerre civile espagnole.
L’historien anglais insiste sur l’idée d’une guerre d’extermination dans laquelle la violence de droite a débouché sur un plan d’élimination systématique des adversaires de gauche. Il montre ce que fut la réalité de la violence politique et de la guerre dans toute l’Espagne. Il met en lumière la violence profondément enracinée dans les rapports sociaux et dans les pratiques militaires, notamment celles ayant cours dans le Maroc colonisé par l’Espagne: viols systématiques, tortures, sadisme, mépris des cadavres, assassinat de femmes enceintes.
Néanmoins, il ne montre pas de complaisance pour les massacres perpétrées par les républicains. Ainsi, à Paracuellos de Jarama, par exemple, au nord-est de Madrid, 2 500 prisonniers politiques furent tués par les républicains entre le 7 novembre et le 4 décembre 1936.
“Pendant la guerre civile espagnole, près de 200 000 hommes et femmes périrent derrière les lignes de combats, victimes d’exécutions sommaires ou après un semblant de procès. Ils furent tués à la suite du coup d’État militaire des 17 et 18 juillet 1936 contre la seconde République. De plus, près de 200 000 hommes périrent sur les différents fronts. Un nombre inconnu d’hommes, de femmes et d’enfants furent tués par des bombardements et dans l’exode qui suivit l’occupation par les forces militaires de Franco. Après la victoire des rebelles, fin mars 1939, environ 20 000 Républicains furent exécutés dans toute l’Espagne. Bien d’autres moururent de maladie et de malnutrition dans des prisons surpeuplées et des camps de concentration aux conditions d’hygiène déplorables. Certains succombèrent au travail forcé dans des bataillons de travail. Plus d’un demi-million de réfugiés furent contraints à l’exil et nombre d’entre eux moururent dans les camps français. Dans le maelström du passage de la frontière puis de l’internement improvisé en France, pas moins de 14 000 civils et militaires espagnols périrent des suites de blessures de guerre, mais aussi de malnutrition et de maladie, pour l’essentiel dans les premières semaines de la Retirada. Plusieurs milliers furent tués au travail dans les camps nazis.” (Prologue, page 9)