Aujourd’hui, dimanche de la Toussaint, un poème de Julio Cortázar:
Los amigos
En el tabaco, en el café, en el vino,
al borde de la noche se levantan
como esas voces que a lo lejos cantan
sin que se sepa qué, por el camino.
Livianamente hermanos del destino,
dióscuros, sombras pálidas, me espantan
las moscas de los hábitos, me aguantan
que siga a flote en tanto remolino.
Los muertos hablan más pero al oído,
y los vivos son mano tibia y techo,
suma de lo ganado y lo perdido.
Así un día en la barca de la sombra,
de tanta ausencia abrigará mi pecho
esta antigua ternura que los nombra.
Salvo el crepúsculo, 1984.
Les amis
Dans le tabac, le café ou l’alcool,
au bord de la nuit ils se redressent
comme ces voix lointaines qui entonnent
une mélodie inconnue sur le chemin.
Comme s’ils étaient des frères du destin,
les ombres pâles des dioscures chassent
les mouches des habitudes et me maintiennent
à la surface d’un tourbillon constant.
Les morts aiment parler mais à l’oreille,
et les vivants sont une main et un toit
qui totalisent le gain et la perte.
Ainsi, un jour, dans la barque de l’ombre,
l’absence de ma poitrine sera habitée
par l’ancienne tendresse qui les nomme.
Crépuscule d’automne. Traduction: Silvia Baron Supervielle. Editions: José Corti. 2010.