[Petite fable]
«Hélas, dit la souris, le monde devient de jour en jour plus exigu. Au début, il était si vaste que j’en éprouvais de l’angoisse, puis j’ai continué à courir et déjà des murs se dressaient au loin, à gauche et à droite, et maintenant – cela ne fait pas si longtemps que j’ai commencé à courir, je me trouve dans la pièce qui m’est destinée, et là-bas, dans le coin, se trouve le piège vers lequel je cours. – Tu n’as qu’à changer le sens de ta course», dit le chat et il la dévora»
«Hélas, dit la souris, le monde devient de jour en jour plus exigu. Au début, il était si ample que j’ éprouvais de l’angoisse, je continuai à courir et je fus heureuse de voir enfin des murs au loin, à gauche et à droite, mais ces longs murs se hâtent tant de se rejoindre que déjà je me trouve dans la dernière pièce et là-bas, dans le coin, se trouve le piège vers lequel je cours. – Tu n’as qu’à changer le sens de ta course», dit le chat et il la dévora»
(Traduction Stéphane Pesnel)
Nouvelles et récits. Oeuvres complètes I, sous la direction de Jean-Pierre Lefebvre. Bibliothèque de la Pléiade NRF. 2018.
[Petite fable] (Kleine Fabel)
Le titre est de Max Brod, qui publia ce texte en 1931, dans Beim Bau der chinesischen Mauer. Entre le piège des humains et la gueule du chat, l’avenir est bien menaçant pour la souris de cette petite fable de La Fontaine revisitée par l’absurde. Kafka recopie aussitôt la première version avec quelques variantes.