Fin de l’imagination
Ce corps ne revivra jamais plus. Quand on touche ses yeux,
on sent qu’une poignée de terre est plus vivante, car la terre,
même à l’aube, se tait, simplement, repliée sur elle-même.
Un cadavre au contraire, c’est le reste de trop nombreux éveils.
Nous avons cette seule vertu: commencer
chaque jour notre vie – devant la terre,
sous un ciel silencieux – dans l’attente d’un éveil.
Certains sont stupéfaits que l’aube soit si dure;
d’éveil en éveil un travail s’accomplit.
Mais nous vivons seulement pour un frisson d’où naît
notre travail futur, pour réveiller la terre une fois.
Ce qui arrive parfois. Puis elle se tait à nouveau comme nous.
Si la main effleurant ce visage n’était gauche
– main vivante qui sent au toucher ce qui vit -,
si ce froid n’était vraiment que le froid
de la terre, dans l’aube qui glace la terre,
peut-être serait-ce un éveil, et les choses qui se taisent
à l’approche de l’aube, parleraient encore. Mais ma main
est tremblante et plus qu’à tout ressemble à une main immobile.
D’autres fois s’éveiller en pleine aube, c’était
une douleur brutale, un spasme de lumière,
mais c’était malgré tout une libération. L’avare parole
de la terre était gaie, pendant un bref instant,
et mourir c’était encore y revenir. Le corps qui attend maintenant
n’est qu’un vestige d’éveils trop nombreux et il ne revient plus
à la terre. Et les lèvres durcies ne le disent même pas.
Travailler fatigue/La mort viendra et elle aura tes yeux. Poésie/ Gallimard (Traduction Gilles de Van). 1969.
Fine della fantasia
Questo corpo mai più ricomincia. A toccargli le occhiaie
uno sente che un mucchio di terra è più vivo,
ché la terra, anche all’alba, non fa che tacere in se stessa.
Ma un cadavere è un resto di troppi risvegli.
Non abbiamo che questa virtù: cominciare
ogni giorno la vita – davanti alla terra,
sotto un cielo che tace – attendendo un risveglio.
Si stupisce qualcuno che l’alba sia tanta fatica;
di risveglio in risveglio un lavoro è compiuto.
Ma viviamo soltanto per dare in un brivido
al lavoro futuro e svegliare una volta la terra.
E talvolta ci accade. Poi torna a tacere con noi.
Se a sfiorare quel volto la mano non fosse malferma
viva mano che sente la vita se tocca –
se davvero quel freddo non fosse che il freddo
della terra, nell’alba che gela la terra,
forse questo sarebbe un risveglio, e le cose che tacciono
sotto l’alba, direbbero ancora parole. Ma trema
la mia mano, e di tutte le cose somiglia alla mano
che non muove.
Altre volte svegliarsi nell’alba
era un secco dolore, uno strappo di luce,
ma era pure una liberazione. L’avara parola
della terra era gaia, in un rapido istante,
e morire era ancora tornarci. Ora, il corpo che attende
è un avanzo di troppi risvegli e alla terra non torna.
Non lo dicon nemmeno, le labbra indurite.
1933
Poesie del disamore (1934 – 1938)