No sé qué nombre darle en mis sueños
Ante mi forma encontré aquella forma
en tiempo de crepúsculo,
cuando las desapariciones
confunden los colores a los ojos,
cuando el último amor
busca el cuerpo postrero.
Una angustia sin fondo aullaba entre las piedras;
hacia el aire, hombres sordos,
la cabeza olvidada,
pasaban a lo lejos como libres o muertos.
Vergonzoso cortejo de fantasmas
con las cadenas rotas colgando de las manos.
La vida puso entonces una lámpara
sobre muros sangrientos;
El día ya cansado secaba tristemente
las futuras auroras, remendadas
como harapos de rey.
La lámpara eras tú,
mis labios, mi sonrisa,
forma que hallan mis manos en todo lo que alcanzan.
Si mis ojos se cierran es para hallarte en sueños,
detrás de la cabeza,
detrás del mundo esclavizado,
en ese país perdido
que un día abandonamos sin saberlo.
8 de agosto de 1929.
Un río, un amor, 1929.
Je ne sais quel nom lui donner dans mes rêves
Je rencontrai cette forme devant la mienne
À l’heure du crépuscule,
Quand les disparitions
Confondent pour les yeux les couleurs,
Quand le dernier amour
Cherche l’ultime corps.
Une angoisse sans fond hurlait entre les pierres;
En route vers l’air, des hommes sourds,
Tête oubliée,
Passaient au loin, libres ou morts ;
Honteux cortège de fantômes
Et leurs chaînes brisées qui pendaient à leurs mains.
Alors la vie posa une lampe
Sur des murs sanglants ;
Le jour déjà fatigué séchait tristement
Les futures aurores, rapiécées
Comme loques de roi.
La lampe c’était toi,
Mes lèvres, mon sourire,
Forme que trouvent mes mains dans tout ce qu’elles touchent.
Si mes yeux se ferment c’est pour te trouver en rêve,
Derrière la tête,
Derrière le monde asservi,
Dans ce pays perdu
Que sans le savoir nous avons quitté un jour.
8 août 1929.
Un fleuve, un amour Editions Fata Morgana, 1985. Traduction de Jacques Ancet.